Vendredi 8 juillet 2011 à 22:33

MOGWAI


Post rock, ergo proper rock.

 

C'est à la cafet-QG de la fac, sous intraveineuse de cappuccino, un jour de partiels que je commence finalement à essayer de mettre des mots sur ce qui s'est passé.

Il faut une dose d'inconscience pour ça, et ma courte nuit m'aide beaucoup dans ma lancée face à cette épreuve périlleuse qui revient à peu près à vouloir mettre à nu le sublime.

Les Ecossais de Mogwai sévissent depuis 1997 avec leur premier album Young Team, sorti deux ans après la formation du groupe. Depuis, ils nous ont gratifié de 19 Eps et 12 albums, dont la BO de Zidane, un portrait du XXIème siècle et celle du magnifique, contemplatif, et génialissime The Fountain, orchestrée par Clint Mansell.

Groupe phare et emblématique de la scène post-rock, probablement le plus populaire, Mogwai est souvent cité comme référence par de très nombreux groupes de styles variés, en plus de porter sans doute malgré eux l'étiquette de fer de lance de la musique expérimentale.


Hardcore Will Never Die, But You Will est évidemment à l'honneur ce soir, même si les anciens morceaux ne sont pas en reste. We're no here, I'm Jim Morrisson, I'm dead, Glasgow Megasnake et le magistral Batcat final sont autant de claques dans ta gueule que de raisons de relativiser par rapport au nouvel album, parfois trop pop voire électro à mon goût.

Sans forcément revisiter leurs morceaux – structures au moins quasi-systématiquement à l'identique des versions studio- les 5 nous délivrent des monuments d'une intensité rare, autant d'invitations à la rêverie collective.

Ils invitent même RM Hubbert, qui a fait leur première partie, à jouer des parties sur quelques morceaux et chanter le seul morceau vocal du set.

Un groupe humainement plutôt cool, quoiqu'un peu statique et mutique, à l'exception de Stuart Braithwaite (guitare) qui prend le micro au début du concert pour le mythique et obligatoire «Hello, we're Mogwai from Glasgow, Scotland. Thank you all for comin'» avec le sourire un peu timide de série, puis régulièrement entre les morceaux pour remercier l'accueil chaleureux que leur offre le public bordelais, bras en l'air et poings en rythme.

Une setlist assez dense avec pas mal de morceaux au delay flirtant avec une minute selon l'ingé son. Le groupe ne se plante qu'une seule fois de tout le concert, un pain repris par ce même delay, justement, et qui s'inscrit pourtant mystérieusement en totale adéquation avec le reste de l'instru, la ravivant, lui apportant des aspérités supplémentaires.


Une grande leçon de rock'n'roll, moderne mais authentique, un son à fendre un monde en deux, un bassiste aux mains de gorille en imposant du haut de sa prestance qui nous sort des lignes d'une pertinence et d'une finesse aussi troublantes que puissantes, deux guitaristes virtuoses capables d'instaurer une atmosphère onirique dès le premier accord, un synthé branché sur Pro Tools et un batteur qui déménage autant qu'il ordonne le chaos sonique salvateur qui fait trembler les murs de la Rock School ce soir.

Entre arpèges inspirés et distos stridentes, le groupe nous emmène dans un voyage physique et spirituel au gré des images qui défilent sur l'écran géant, en haut de l'arrière-scène; transformations géométriques hypnotiques ou mini-films à base de plans de routes dévalées qui ne sont pas sans rappeller le clip To the skies from a hillside des Anglais de Maybeshewill.

Et c'est exactement là que les Gremlins nous mènent, des hautes terres d'Ecosse jusqu'au ciel, pour certains même le 7ème, à voir la vague d'énergie qui anime la fosse.

Orgasmique pour peu qu'on soit capables de se laisser porter par la musique et son flux instrumental, abandonné au plaisir de la reconnaissance de morceaux déjà cent fois écoutés dans d'autres circonstances.

Regret majeur de mon côté, Christmas steps est irrémédiablement absente de la setlist, frustration qui disparaît à la première note du Batcat fina, rappel qui vient achever violemment un public conquis.


Si Mogwai traîne la réputation de ne pas être un groupe de scène, c'est pas ce live qui va le justifier.

 

Orjan

 

MOGWAI, 24 MARS, ROCK SCHOOL BARBEY, BOREDOM CITY.

Vendredi 8 juillet 2011 à 22:35

TOTORRO.

 

Ah, Totoro... Chef d'oeuvre de l'animation japonaise que j'ai pas vu.

Le personnage éponyme est un esprit des bois, sorte de grand ours tout mignon, pacifique et gentil, qui aide des enfants dans leurs tâches de la vie quotidienne. Ce film contemplatif a aussi donné son nom à un astéroïde.


Pourquoi je vous dis ça ? Parce que justement, Totorro, c'est tout ça. Un post planant et posé, pas loin des profondeurs du Pacifique, qui ne met pour autant pas la rage de côté. Ça explique peut-être la présence de ce deuxième «r» qui évoque Zorro et poserait le groupe en fervent défenseur d'une musique donnée sans merci ni mode d'emploi.


A leurs côtés, on traverse des ambiances, des paysages qui prennent par leur musique un nouveau souffle, une aura dorée, apaisante. Même dans les tempêtes sonores qui sévissent en général dès le milieu de leurs morceaux, un équilibre est là, parfois fragile, mais toujours présent, comme pour nous rappeller que c'est aussi ça, la vie. L'inconnu et la prise de risque, les défis qu'on relève, faute de quoi on tombe, le désir d'aller plus loin, moteur irréfutable, et par dessus tout, cette sensation étrange que tout n'est qu'une seule chose.


Totorro livre une musique épique, unie, cohérente et limpide. Chacun de leurs morceaux te parlera de différentes façons suivant les circonstances dans lesquelles tu l'écoutes. D'accord, c'est vrai pour la musique en général, surtout quand elle est instrumentale, mais les Rennais arrivent à accéder à un niveau supérieur. Ils envoient comme Mogwai, et j'exagère à peine. Le batteur nous sort même sa steeldrum* sur un morceau, et là, la salle déjà étroite du Fiacre se fait encore plus intimiste pour une intro sensuelle aux relents de traditions africaines.


Et ça, ça prend tout le monde au coeur. Progressivement, l'intensité monte, les corps se cambrent dans un mouvement commun pour finir dans une explosion jouissive et électrisante.


Ce soir là, j'ai pris ma claque jusque dans le futal, d'autant plus que je ne venais pas pour eux, mais pour les Caennais de Sugartown Cabaret. Leurs voisins Totorro ont pourtant retenu toute mon attention, grâce à un feeling puissant et une maîtrise instrumentale digne des plus grands. Je ne peux que vous conseiller de juger sur pièce en checkant les liens sous la chro. En leur achetant des Eps. En réservant leur album. En en parlant autour de vous. En paraphrasant Eric et Ramzy : «Cette musique est de toôôute beââuté».

 

 

Orjan.

 

*Un truc qu'il a fallu être un grand malade pour l'inventer.

 

 

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