Vendredi 15 février 2013 à 17:50

 

- Salut les jeunes, bien dormi ?

- Ta gueule.

Le choeur était joué par Sonia, Neto, Kepa, Lola et moi-même. On nous applaudit bien fort.


- Merci. Je comprends que vous y caliez pas grand-chose, mais bientôt tout va s'éclaicir, dit-il d'une voix très calme.


Un jour on lui sortira de quoi le démonter. Un jour...


- Avant que vous ne partiez faire face à vous-mêmes, il y a deux personnes que vous devez rencontrer.


Le bar s'est mis à trembler, l'atmosphère vagument délétère et au fond un peu complice s'est allégée, et le sol et le plafond se sont disloqués.

On a tous entonné la chanson de Space Mountain.

Neto a été le seul à trouver ça cool et Kep a attrapé sa dulcinée par le bras pour éviter qu'elle se barre après avoir tué Soda.

Deux magnifiques demoiselles sont apparues. Irréelles. Cheveux d'un blanc argent brillant pour l'une, noir d'ébène pour l'autre avec des reflets rouges d'une fluidité fascinante. Grands yeux gris-violets pour la première (si, si, c'est possible), rouge feu plus fins pour la deuxième. Un corps à faire profondément douter n'importe qui de la pertinence du concept de fidélité pour les deux.


- Je vous présente Blanche et Noire Samarcanda. Elles sont bonnes, hein ?

- Salut Soda.


La bouche de Noire s'est doucement étirée en un sourire tendre et de ses lèvres finement dessinées est sortie la plus belle voix que j'aie jamais entendue. Une mélodie d'un autre monde, une vibration à la pureté incomparable.

Les drôles de dames nous ont regardés avec paix et sagesse. Je me suis senti foutrement bien. Solenne m'a foutu un coup de coude et a pointé ses seins du doigt. Sympa.

Seb avait calé ses yeux dans les braises de Noire et semblait décidé à les y laisser pour les deux ou trois prochaines éternités.


- Voilà le groupe dont je vous ai parlé. Je voudrais que vous les guidiez le moment venu.


Elles ont acquiescé calmement. Bordel, Morticia est super bonne. On dirait Solenne devil-style. Deuxième coup de coude façon «Matte les miens plutôt».


- C'est qui les deux gothiques ?


Neto, ben... Neto, quoi.


- Noire est une damante et Blanche une banshee. Elles sont soeurs et bossent dans la gestion évenementielle. Les damantes sont là pour s'assurer que ce qui doit arriver arrive, et les banshees s'occupent d'éviter les collisions. En gros, que ce qui ne doit pas se produire ne se produise pas. 
Contingence, déterminisme, champ des possibles. Tout ça c'est elles.  Je voulais que vous les voyiez avant d'y aller. Comme ça, une fois de l'autre côté, vous pourrez me croire. Soyez attentifs.

- Okay donc on part dans l'inconnu pour guetter un Deus Ex.
- C'est lui, le leader ?

Noire est envoûtante, un truc de malade. Troisième coup de coude "Je sais que tu es à l'étroit dans ton slip mais j'ai une option sur toi". Prendre la parole ou dire «Aïe».


- Arrêtez avec ce mot.

- Ouais, c'est lui, lâcha nonchalamment Soda, pieds appuyés sur la table en se balançant sur sa chaise.

- Je l'imaginais plus carré, a dit Blanche.

- Il est parfait comme ça.

 

Euh ouais mais non quand même. Faut pas déconner.

- Solenne, arrête !
- Vos gueules les amoureux, on a un monde à sauver. Enfin si c'est ça le plan ultime.
- C'est lui, Neto ?


Dire qu'il m'appellait chef y'a encore quelques heures... On risque de pas tarder à se refoutre sur la gueule.


- Non, j'en ai eu marre de l'ambiance post-apo, j'ai vu de la lumière alors je suis rentré. De qui vous parlez ?


Elles ont ri. J'avais jamais entendu un rire comme ça. Il était diablement pur, avec un drôle d'effet éthéré, repiqué avec un delay.

Quatrième coup de coude. Prochain coup elle va me plaquer la tête dans son décolleté, c'est pas possible autrement.


Noire a reporté son regard sur Seb qui disait toujours rien.


- C'est le moment, dit-elle. Je compte sur toi.


Regard noir de ma muse. Maintenant c'est sûr, Solenne va m'émasculer dans la prochaine scène. Adieu, virilité... On s'est bien marrés. Même si parfois tu me cassais les c-

- Faudrait arrêter de me voir comme un leader. C'est Seb le chef maintenant. Il nous a à peu près sauvé la vie cette nuit.

Noire a encore souri et je me suis décalé discrètement de la trajectoire d'un hypothétique mom dolyo tchagui émanant des parfaites gambettes de ma dulcinée chérie d'amour.
J'ai remarqué une tension asymétrique de sa lèvre qui m'a instinctivement fait dire qu'elle avait quelque chose à cacher à propos de ce fameux blocage de portes. C'est son boulot, après tout. J'ai rejoint les autres en haut.

A l'étage-mezzanine, en face des portes, on s'est vite rendu compte que certaines portaient nos noms. Les trois démons nous regardaient avec bienveillance.

Sonia s'est plongée dans la contemplation de la rambarde en bois, garde-fou rationnel presque rassurant.

J'ai brûlé un coup et pointé Soda de ma basse.

- Je te fais confiance, mais c'est peut-être la dernière fois.

Réplique pourrie. Pourtant je flippe pas. J'ai l'impression de plus ressentir grand-chose de négatif depuis un moment.

- S'il se passe encore n'importe quoi, je me démerde pour revenir et j'te pourris la gueule.

Ça c'était peut-être déjà mieux. Neto m'a suivi.

- T'as intérêt à m'en laisser un bout, je supporte pas qu'on m'oblige à être libre.

- Hé ben enfin ils comprennent ! s'est soulagée Lola. Compte sur moi pour te finir quand t'auras étalé les deux autres.


Soda a ri, Neto a traité Lola de pute, Sonia a lancé une pièce en l'air en s'engouffrant dans l'ouverture de la porte. Sa pièce est retombée en tournant en équilibre sur la tranche à l'endroit d'où elle venait de disparaître.

- C'est vrai, a dit pensivement Blanche. La fin du monde était la seule solution.


La pièce est finalement retombée sur le côté du 1. J'ai roulé à Solenne la pelle de sa vie et j'ai claqué derrière moi la porte qui portait mon nom, quasi-certain d'atterir dans un bordel qui lui, n'en aurait pas.

 

Vendredi 15 février 2013 à 18:36

 Dans lequel Neto nous livre un résumé tout personnel des évènements. Dans lequel Mindfuck me, I'm famous. Et puis rajoute des frites, tiens, j'ai pas mangé à midi. Dans lequel on se rapproche doucement mais sûrement de la théorie du complot.


 

- Pourquoi tu m'aimes ?

- J'ai rien de mieux à faire.


J'ai dit ça machinalement, comme si quelqu'un venait de me le souffler. Mes souvenirs se clarifiaient lentement pendant que je fixais mon plafond branlant l'oeil vide. Les murs gris-bleu de mon appart me rappelaient à la réalité plus que sa voix.


- Je sais pas comment je dois le prendre.

- Ben prends-le bien.


Un silence. Courroucé et caché. Faut que j'arrête les filles sensibles, un jour ça va finir par leur faire du mal.


- Au moins je t'aime. C'est mieux que rien.

- Ouais, surtout venant du dieu de la baise.

 

Ouh. Ironie sarcasmatique. Pas au réveil, surtout pas. Et jamais après les changements de réalité cosmico-mystiques, c'est un principe de vie.


- Parce que pour moi c'est justement ça.

- Nooon, pas de jeux de mots foireux quand j'ai la tête dans le pâté, pitié...

- C'est la baise. Je te donne tout et tu t'en fous comme de ta première pipe.

- Hé, parle pas comme ça de mes premiers émois de 5ème !

- Putain d'égoïste, soupira-t-elle avec une grosse dose de véhémence.

 

Over. Là elle va partir et me laisser tranquille assez longtemps pour me permettre de faire le tri dans mes souvenirs, et accessoiremment j'aurai pas à me souvenir de son nom.

J'ai senti un truc. Puis un deuxième, physique cette fois-ci.

Ses mains de chaque côté de mon visage, je me suis rendu compte que je l'avais pas regardée depuis mon réveil.


Sofy.


Mon palpitant me fait défaut pendant plusieurs interminables secondes et creuse un vide brûlant dans ma poitrine. Bien fait pour ma gueule après avoir été un énorme salaud égocentrique avec cette fille que j'étais sans doute censé aimer depuis un moment, mais c'est différent
 depuis que je viens du futur.


- Aimer quelqu'un qui t'aime aussi, c'est de la branlette émotionnelle pour heureux imbéciles. Aimer quelqu'un qui en a rien à foutre de toi, ça, c'est de l'amour. Et je t'aime, Neto.


Wouh putain. Si ça c'est pas de la punchline de première classe, c'est elle qui paye le restau ce soir.

- Mais je me respecte aussi, sans quoi ce serait malsain. Et si tu me reparles encore une fois comme ça, je te broie ta virilité toute entière et ce sera la seule chose que je te laisserai.


Elle m'a embrassé avec passion et on s'est remis à faire ce qu'on sait faire de mieux.

 

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Hé ben j'ai bien fait de payer ma tournée l'autre fois... Grâce à qui on a encore une scène de sexe gratuite ? Hé oui, c'est grâce à Bibi !

 


Non, non, narrateur. T'as eu ton quota de boobs pour la semaine, l'autre fois. Je raconterai rien.

 

 

Enfoiré. J'me casse. Putain d'ingrat.

 


Une heure plus tard.

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Juste une heure plus tard ?

 


Ouais. Juste une heure plus tard. Et je raconterai toujours rien.

 

Rien ?! RIEN ?!

 

 

 

Voilà. Comme dans la chanson.

 

 

 

Putain j'me casse. Vraiment, cette fois.

 

 

C'est ça, on y croit tous.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Bon, ben on a l'air débarrassés de lui. En attendant qu'il revienne, voilà la suite.

 

 

Après cette heure de débauche, j'ai eu un putain de choc à la tête. Submergé de souvenirs et d'émotions d'une déferlante similaire à une machine à sous qui affiche un triple 7.

Il y avait aussi une autre fille, mais ma mémoire brumeuse accusait une sacrée gueule de bois dûe au décalage horaire salement burné qui m'infirmait le cerveau depuis mon retour dans le réel. Enfin, le passé quoi. C'est pareil de toute façon.


- J'te demande pardon, Sofy. Je manque à tous mes devoirs, en ce moment, à commencer par celui du sommeil.

Oh c'est bon ça. Ça va prendre, ça va prendre, c'est obligé.

- Alors pour toi, m'aimer c'est un devoir.


Et merde. Sûr que c'est une vengeance du narrateur. Mais à ce moment-là, ça veut dire qu'il est aussi le script. Ou qu'il est très pote avec le script, et à ce moment-là, le script est une enflure.

 

Je me suis levé et rhabillé.

- Je vais chercher des clopes. T'en veux ?


Ouais, je sais que je suis un lâche.

- Deux paquets, motherfucker.

Oh ouais, pour un peu je me prendrais presque pour Hank Moody aux prises avec les difficultés du scénario.


- Ça marche. J'en ai pour dix minutes, ça te laissera le temps de réfléchir à ce que je t'ai dit, si j'suis si important pour toi.

- Crève.

- Moi aussi j'te kiffe.

 

Elle a ri, finalement. M'a tendu ses bras pour un câlin, je lui ai fait un baisemain à la place.

Note pour plus tard. Ne jamais sortir en chemise, après avoir passé trop de temps dans un baisodrome pas aéré.


IL FAIT SUPER FROID PUTAIN.


Soleil éclatant + vent glaçant. J'ai dû laisser mes neurones de l'autre côté. Je me frictionne comme je peux en râlant à mi-voix. Je suis pas vraiment là, j'ai l'esprit ailleurs et les yeux à moitié fermés. Trop ailleurs pour pas regarder avant de traverser. Peut-être que c'est finalement les voyages dans le temps qui rendent con.

Un bon gros coup de klax m'a tiré les yeux hors des orbites. Au moins maintenant ils sont complètement ouverts. Et j'ai le cul par terre en plein milieu de la route. Je me relève vite fait pour croiser le regard d'une fille que j'étais pas censé connaître à ce moment-là.

- Vous allez bien, monsieur ?

Froide et timide, douce et distante.

- «Monsieur ?» J'ai l'air si vieux que ça ?

- Excusez-moi.


Est-ce que c'est vraiment elle ? Putain mais où j'en suis, bordel ? Quelle année ?

- Vous êtes sûr que ça va ?

- J'en sais rien, et vous ?

Elle s'est mise à rire.

- Vous êtes plutôt cool pour un type qui vient de se faire renverser.

Mes yeux ont bien failli ressortir une deuxième fois.

- Quoi ?

- Vous vous êtes pris un aller simple pour l'autre côté par un capot de Mercedes. Mais apparemment, votre vol n'est pas parti.

- Ça va, y'a pire...


Elle a souri.

- Ah, je crois que le voilà.

Un caucasien carré à la tronche d'acteur porno avançait vers moi depuis l'autre bout de la rue. Il émanait de lui un mélange de «J'suis désolé, vous êtes blessé ?» et de «Mais t'es complètement con de traverser comme ça sans regarder, espèce de pourriture de témoin de Jéhovah !», le tout saupoudré d'un généreux soupçon de «Mais il est où ce con ?»

 

[rajouter un paragraphe où Neto prend le temps de regarder la demoiselle.]


- Ça te dérangerait de me couvrir ?

- Pardon ?

 

Je lui ai montré le bureau de tabac du menton.


- Je rentre là-dedans et toi tu fais tout ce que tu peux pour l'éloigner. Invente un truc, n'importe quoi. Une fois qu'il s'est barré, tu viens me le dire. Okay ?

- Hum d'accord. Mais il faudra que je vous pose quelques questions.


Son sourire grandit et trahit un peu d'excitation derrière son calme. Pas de doute, c'est bien elle.


- Tout ce que tu veux, lançai-je avant de m'engouffrer chez le dealer de cancers.

Le miroir disait que mes yeux s'étaient refermés à moitié, comme si rien ne s'était passé et que ma vague douleur sacro-illiaque n'était qu'un bonus DVD des voyages dans le temps.

Il rajoutait que j'avais besoin d'une bonne coupe et de me raser. Je ressemblais à Kurt Cobain croisé avec Jim Morrisson. Du grunge psychédélique, ouais, et selon la fille calme et tranquille qui est très probablement elle, je devrais être tout aussi mort qu'eux.

Kurt et Jim en version européenne, s'il faut le préciser. Donc en bien moins sex. Je sais pas ce qu'elles me trouvent. Faudrait vraiment que je pense à faire un sondage, un jour.

- Monsieur ? ... Monsieur !

Buraliste me coupe dans ma passionnante discussion avec le miroir. Dommage, on allait arriver au passage où il me dit que j'ai de beaux yeux, je sais ?

Et puis qu'est-ce qu'il y a avec tous ces «Monsieur», c'est une conspiration ?


- Ouais, pardon. 4 paquets de Lucky, s'il vous plaît. Et mettez-moi deux demis aussi.

Je suis allé m'asseoir en ressassant tous les souvenirs qu'il me restait. Ou que j'avais récupérés. Je sais même pas en quelle année on est, et une flemme puissante m'empêche d'aller trouver ma réponse du côté des périodiques.

Et puis quel âge j'ai ? Je suis peut-être un loser qui cumule encore les plans cul à 30 ans, au lieu de se poser comme tout le monde. Si c'est le cas, ça veut dire que j'suis aussi mauvais en «tout le monde» qu'avant. Je suis donc resté le même, et ça, c'est bon signe.

En quelle année j'ai rencontré Anna, déjà ? Après avoir perdu Sonia, c'est sûr.

Pas étonnant que j'aie été aussi sec avec Sofy, tout à l'heure. Je m'en rappellais sans le savoir. L'inconscient...

- Merci.

J'ai pris une gorgée en sortant de quoi payer l'actif pour l'inertie, ma main libre sur mes pensées, évitant de regarder les jeunes filles autour dans les seins.

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T'es irrécupérable, mec.

 

 

Je l'avais dit, ça aura pas duré longtemps. En parlant de ça, elle est où, Peut-Être Anna ? 'Tain, je suis vraiment pas fait pour attendre.

J'ai repris une gorgée. J'ai pas le souvenir d'avoir déjà été percuté par une voiture, ou même failli. D'ailleurs j'ai mal nulle part, à part au suçon que Sofy a cru bon de me faire de le bas du cou. Je relève mon col. La bière me fait trembler et envole mes pensées.


Avant la fin du monde, comment j'ai rencontré Anna ? A la fac, je crois. Et en ce moment, j'ai un taf suffisamment bien payé pour traîner avec 40 boules dans la poche sans lever le sourcil.

Faut que je retrouve mes carnets, vite.

Pour l'heure je suis coincé ici. Elle avait l'air d'avoir envie de continuer à me parler.

 

Range ton putain d'ego à la con et bois ta bière.

 

 

La porte s'est refermée au moment où j'ai reposé mon verre. La scène s'est ouverte sur la blonde la plus canon de ma génération. Enveloppée dans un manteau de mi-saison, elle m'a posé ses yeux d'ange dessus et j'ai pas pu décoller les miens de son visage. Jamais vu une finesse comme ça. Ou enfin si, puisque je la connais. Mais là je la connaissais plus. Enfin pas encore. Enfin vous avez compris.

Elle souriait.

Vient vers moi, s'installe. Je lui approche le deuxième verre d'un doigt, le dos toujours contre ma chaise.


- Il est parti ?

- Oui. Ne vous inquiétez pas.

- Hé, pas de «vous» avec moi ! Souris-je

- Pardon. J'ai... pas l'habitude. Et ce que vous m'avez demandé de faire était... excitant. Je me croyais dans un film.

- Mais on est dans un film ! Pourquoi tu crois que j'ai commandé une deuxième bière ? J'ai le sens de la mise en scène, moi, mademoiselle !

- Elle a ri doucement et m'a tendu sa main.

- Anna. Enchantée.


Mon coeur a fait une vrille carpée. Elle avait l'air sincère. Mais c'est elle bordel ! Je lui ai fait un baisemain par réflexe. Et merde. Mais c'est génial ! Enfin je crois.

- Tout le monde m'appelle Neto. Tout le plaisir est pour moi, mais on peut partager, si tu veux.

Encore un sourire.

- Partageons alors, Neto.

Je me suis recalé contre mon dossier.

- Je t'écoute.

- Pourquoi vous m'avez demandé de vous couvrir ?

 

Heu... 1) Parce que j'aime pas être emmerdé par une doublure bite quand je vais acheter des clopes pour deux. Les plans à              trois avec un mec, c'est hors de question.

 

    2) Parce que j'ai suffisamment d'ennuis avec les flics pour vouloir éviter de remplir un constat, même si ça peut me rapporter des thunes. «Dédommagement corporel» ils appellent ça, je crois.

    3) Parce que tu est magnifique et que c'était le meilleur moyen pour te draguer. Cet exemplaire de «Comment draguer efficacement dans les bars-tabac» que tu vois à côté du comptoir le confirme à la page 26.

 

    4) Parce que je suis un putain de gros lâche.

    5) Parce que j'ai apparemment déjà failli mourir une fois aujourd'hui et que j'ai pour principe de pas tenter le diable, si jamais il existe.

 

- Je sais pas, je l'ai senti comme ça.

- Vous êtes habile. Même si vous ne mentez pas, vous ne me dites pas la vérité. Vous êtes catholique ?

- Dieu m'en garde, j'ai déjà du mal à croire en l'homme...

Sourire.

- Et en vous ?

- J'en parle même pas.

- On dirait bien que j'ai ma réponse, sourit-elle encore une fois.

- J'ai déjà assez d'ennuis pour le moment.

- Votre vrai nom, qu'est-ce que c'est ?

- On s'en fout.


Elle est sacrément intéressée ou je m'y connais pas.


- Bien. Je pense que je vais y aller, se leva-t-elle.


Ah merde. Autant pour moi.


- Attends !


Je l'ai attrapé par le bras en priant pour que ma skill des yeux à moitié fermés mais déterminés fonctionne une fois de plus.


- T'as dit que j'avais été percuté par la Mercedes, mais j'en ai aucun souvenir, et j'ai mal nulle part.

- Je sais.


Je me suis recalé sur ma chaise et elle s'est rassise. Bingo.


- Je commence à penser que t'as pas mal de choses à me dire et que tes questions n'étaient qu'une façon de s'amuser un peu.

- Monsieur Neto, je vous demande pardon, mais on ne peut pas parler ici.

 

On dirait Catwoman timide qui joue dans Usual Suspects. Ne pas relever, surtout.


- Finis ton verre et on décolle.


La porte a claqué derrière nous.


- Je dois te dire beaucoup de choses, Lester.

 

J'ai avalé ma bouffée de travers et manqué de me brûler avec la clope. Dommage, ça aurait pu me réchauffer.


- On m'a pas appelé comme ça depuis des années.

- Je sais.

- Dis-moi ce que tu sais pas, ça ira plus vite.

- Je ne me souviens jamais si la 11ème décimale de Pi est un 8 ou un 9.

Parce qu'elle a de l'humour, en plus. C'est vraiment Anna ? 

- Qu'est-ce que c'est que tout ça ? Pourquoi tu m'as fait un plan aussi bizarre ?

- J'avais besoin d'être sûre que c'était le bon toi.

- Hein ?

- La bonne strate, si tu préfères.


Ça commence à m'énerver cette histoire. J'y voyais plus clair dans la ville fantôme. Me dis pas qu'en fait c'est Blanche ? Elles se ressemblent pas mal, en plus...


Elle a souri.


- Rentrons chez toi, tu vas attraper froid.

 

 


J'ai ouvert la porte de l'appart, laissé passer Anna, et elle s'est pris une culotte au visage.

A jeté son manteau sur une chaise à travers la porte de la cuisine et embrassé Sofy qui restait la bouche ouverte en attendant de trouver les mots pour formuler un râle à peu près civilisé et à la mesure de mon retard. L'a plaquée sur le lit et a commencé à jouer plus ou moins sauvagement avec elle.

Lever d'yeux au ciel dans un soupir de mon côté.


- Pourquoi faut toujours baiser avant de discuter ?


 

 

Vendredi 15 février 2013 à 18:47

Dans lequel j'ai à peine fait une mise en page décente et je me demande qui peut bien me lire (surtout si rapidement). Manifestez-vous dans les commentaires où je pars en génocide de phoques pour asserter ma rébellion contestataire envers le consumérisme et son emprise sur notre paysage socio-démographique, et après j'irai boire avec des Irlandais.


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Tous les trois allongés sur le lit. Une belle musique post en fond sonore.

La vie.

- C'est la première fois que ça m'arrive, a dit Sofy. Je pensais pas que ça serait aussi bon.

- Te faire sauter dessus par une inconnue que ton mec a ramenée ou que ça finisse à trois dans le lit ?

- Les deux. Et t'es pas mon mec.


J'ai souri. Anna aussi.

- Même pas mal.

Petite pause. Je suis allé chercher une cigarette.

- Bon. Anna, ...

- Pas encore.

- Qu'est-ce qui se passe ?


J'allais lui répondre quand son téléphone a sonné. Elle s'est levée, nue, comme si j'avais besoin de me rappeller à quelle point elle est belle. Partie répondre dans la cuisine.


- Tu savais ? Fis-je avec un geste vers la direction qu'Anna avait prise.

- Oui.

Facile a dire maintenant que c'est fait. Pourtant ça fait son effet. Surtout si c'est Blanche. 

- Mais t'es qui, toi ?

- Pas encore, Lester. Plus tard, je te le promets.

J'ai râlé.


- Nous sommes en plein paradoxe.

- Ouais, merci, j'aurais eu du mal à passer à côté ! Normalement j'étais pas censé te rencontrer comme ça, ni te ramener chez moi après avoir manqué de me faire écraser, tu devais pas te taper Sofy avant que je te la présente, et sans déconner, c'est quoi ces manières ?

Murmurer en gueulant, c'est marrant. Vous devriez essayer.


- Calme-toi, Lester.

- Non ! Tu vas tout de suite me

 

Slurp. Rouler une pelle, ouais. C'était pas ce que je voulais, mais bon.


- Dire ce que je sais, oui.


Murmure d'une ange à mon oreille. C'est trop, je mérite pas.

- Elle va bientôt revenir.

- Et partira juste après.

- Ouais. Evidemment.


Les seins de Sofy se sont balancés un court moment après qu'elle ait fait irruption dans la chambre en claquant la porte. Si j'étais pas aussi obsédé par la curiosité qu'Anna avait excitée en moi, je lui aurais sauté dessus sans autre forme de procès. 


- C'est la merde, je dois y aller.


Elle s'est rhabillée en vitesse. Je lui demande ce qui se passe ?

 

Non, vaut mieux pas. De toute façon elle te le dira la prochaine fois.

 


Ah bon, si tu le dis, Narrateur.


- C'était un plaisir, mademoiselle. A bientôt, j'espère.

- Compte sur moi.


Anna a le truc pour faire d'un sourire un moment envoûtant et enchanteur.


- Fais attention à toi.

- Toi-même.

- A la prochaine.


Je suis allé la raccompagner. «Ca va pas du tout. J'aurai sûrement besoin de te parler.»

Et voilà, renvoyez les violons.

- Ouais, bien sûr. Passe à l'appart quand tu veux. Et excuse-moi pour tout à l'heure. Et pour toutes les fois où j'ai probablement été un connard.

Smoutch, schclac, switch.

Retour à la chambre. La couverture à ses pieds, Anna était en train de se masturber.

- NON MAIS SANS DECONNER ?!!

Elle me répondit d'un gémissement.

- Allez, arrête tes conneries et dis-moi tout, maintenant.

- Nous sommes dans une réalité alternative, dit-elle sans arrêter de se toucher. Tu as des choses à y accomplir, dont une plus importante que les autres. Une fois que tu l'auras faite, tu retourneras d'où tu es venu.

- Et c'est quoi ?

- Toi seul peux le savoir, Lester.

- D'où tu connais mon prénom ? Et tout le reste ? Même quand on était ensemble, je te l'avais jamais dit !


Elle gémit à nouveau. Je me suis subitment calmé en la regardant plonger ses doigts en elle d'une main et jouer avec son clitoris de l'autre. Ça avait quelque chose d'hypnotique.

Elle était omplètement nue. Sofy est vraiment pas la seule à avoir des boobs à tomber.


- Tu sais comment ça va entre Sonia et moi, en ce moment ?

- Je n'en ai aucune idée.

- Super. Et qu'est-ce que tu sais d'autre ?

- Je t'ai déjà tout dit, Neto.

Elle m'a appellé Neto. Sympa, l'attention.

- Il faut que tu dormes, maintenant.

J'ai explosé de rire, sans penser à lui demander ce qu'elle allait faire, ni en quelle année on était censés être.

- T'en as de bonnes, toi. J'vais à un concert avec le reste d'espoir que je viens de sortir du micro-ondes - et me demande pas où j'suis allé le chercher parce que j'en ai pas la moindre idée - sans savoir que ce soir-là, c'est Apocalypse Party, bordel. Ensuite de l'autre côté je me retrouve à jouer au ninja et à casser la gueule à des streumons gigantesques sans être capable de comprendre comment j'y arrive ni d'où ils sortent, je retrouve celle que j'avais jamais cessé d'aimer, elle me fout son pied dans la gueule et après ça il est question de Dieu qui s'appelle Karma et aurait décidé de déclencher la fin du monde pour que les gens fassent enfin ce qu'ils étaient supposés faire depuis le début. Et quand j'ai finalement décidé de suivre les autres dans ce truc de taré, je me retrouve dans un univers alternatif à la con dans lequel j'ai à peine plus de 20 ans et je t'ai déjà rencontrée.

J'y comprends rien.

- Au contraire.

 

BLACK ME OUT.

 

Comme si elle venait de lire ces mots, elle s'est levée, m'a pris dans ses bras et je me suis rappellé de rien.

 

 

Je me suis retrouvé en slip dans mon fauteuil, avec mon portable dans la main. J'ai reçu un SMS en pleine gueule. «Sonia», disait mon téléphone.

Putain le rêve. Vais pouvoir éviter toutes mes erreurs. Clope entre les lèvres, je suis allé me chercher une bière. «J'ai eu raison de lui faire confiance», me dis-je en essayant d'empêcher mon coeur d'exploser trop fort.


Coeur qui a loupé trois battements quand un «Neeeetoooo... Reviens au liiiit...» a retenti avec la douceur d'une tempête de plumes dans les murs de mon appart.


Et j'ai absolument aucune idée de qui c'est.

 

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