Vendredi 1er juin 2012 à 1:10




Des accords de basse ont déchiré l'atmosphère. Deux par deux. De plus en plus forts et rapides. Nerveux. Assourdissants. Rythmique guitare / batterie imparable s'est posée dessus, consistante avec notre entrée.

Un hurlement encore plus grave que la basse a fait trembler ce qui restait de murs. J'ai allumé la mienne au cas où. Solenne a regardé son portable. 

- Le temps s'écoule 4 fois moins vite ici.

- Ca va, il va pas nous attendre trop longtemps, Soda, sourit Kepa.

- Ouais ben c'est pas une raison pour traîner ici. Je sais pas ce qu'on fout là, mais je le sens pas, lâcha Neto, la main crispée sur son sabre.

- Personne se demande de quoi peut bien sortir un cri pareil ? demanda Sonia, qui commençait à perdre patience.

- Je crois surtout qu'il y en a pas un qui a les couilles de partir vérifier, lui répondit Lola avec un sourire sarcastique.


Un bruit d'éboulement se rapproche de nous. Réagir, vite.


- Pas besoin, souffla Neto. Courez, ça suffira.

- T'es fou ? On a pas fait péter le budget effets spéciaux pour rien ! 

Ignorant mon argument, Neto a détalé. Je lui aurais bien enflammé le crâne.

Ouh putain.

Je veux pas me la jouer blasé, mais depuis qu'on est ici, on en a vu. Mais apparemment pas tout.

Une créature de chair sanguinolente et musculeuse sort des décombres du mur qu'il vient de pulvériser. Ses petits yeux scrutent dans ma direction. Je soutiens son regard en priant pour pas me pisser dessus. Pourquoi il a fallu que je récupère mes émotions maintenant ? Le peu qui était revenu dans le "réel" était déjà pas évident à gérer, mais là...

- Courez, dis-je de la voix la plus calme que j'avais en stock.

- Ouais. Courez, a asserté Kep. On vous couvre.

J'ai été surpris. Agréablement, aussi.

Le streum faisait bien six-sept mètres de haut, sur quatre de large. Peau grise et décharnée, à vif par endroits. Quelques gouttes de son sang viennent abreuver les décombres qui l'ont fait couler.

Il a pas l'air très content. Comme pour me confirmer cette idée, il a rugi une fois de plus et son souffle putride nous a poussés en arrière, glissant sur la terre meuble.

Et là c'est le moment où tu regrettes amèrement d'avoir voulu jouer les héros. Je sais pas pour lui, mais moi, j'ai les tripes qui dansent et le bide en bordel. Lenne se fait lourde. Et merde, manquait plus que ça.

Kepa travaille la bête au corps façon taureau par les cornes et moi je suis incapable de brûler. Pas faute d'essayer. Putain de boulet. 
Il s'est pris une baffe qui l'a fait voler dans la lande environnante. Gargantua me charge. C'est la fin. C'est la fin et je serai resté en retrait jusqu'au bout. Prier pour que Kep soit encore en vie. Arrive pas à m'énerver, ni à brûler. Je sers vraiment à rien. Au moins les autres ont pu partir.

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Putain Dan reste pas là les bras ballants avec ta basse trop lourde, tu me fais pitié.

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Le sacrifice sera pas vain.


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Putain mais t'as fini ouais ? Bats-toi ! 

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Je pense à Solenne. A Aurélien et Pierrot qu'on a pas pu retrouver. Je souhaite à Neto d'obtenir ce qu'il était à l'origine venu chercher. 

La créature de Frankenstein me percute. Je serre Lenne à deux mains de toutes mes forces, comme pour la protéger, avant, pendant et après le vol. A mon tour d'être dans la lande. Je vois pas Kepa et j'ai mal à tout le corps.
 Pas possible de me lever. En même temps je peux pas y voir grand chose d'où je suis. Merde, je vais quand même pas me laisser tuer sans porter un coup. Ca se fait pas, ça. 
Je commence à m'aigrir. Une flamme taquine le bout de mon doigt. Last cig before death ? Don't bet on it.

Je me suis redressé en hurlant de tous mes os craqués en même temps. Tremblant, j'attrape mon paquet de cigarettes et m'en cale une entre les lèvres avant de retomber lourdement sur le dos. J'ai mal, bordel. 

Essaie de me détendre et de me calmer, de profiter au possible de chaque bouffée pour me dégager de la douleur, l'éloigner au maximum.


RAAAAAH. Putain !!


Je balance ma clope dans l'herbe, excédé. Me relève à nouveau, les os qui re-craquent de toutes parts, mon cerveau me crie que je suis pas en meilleur état qu'un meuble Ikéa avant assemblage et que je vais plus trop tarder à finir au rayon pièces détachées de l'usine à rêves.

Fuck me to death. Les yeux sans doutes embrouillés par la douleur, je crois voir Pierrot me faire un thumb up. Transpirant, chaque muscle de mon corps tendu et les nerfs chauffés à blanc, je me relève, complètement cette fois. Le feu prend le relais. Sauvé.

Ma tête continue de tourner, mes os se replacent, les blessures se referment, même mes fringues retrouvent leur apparence d'origine. Va savoir pourquoi.

Je prends Lenne dans mes bras et la serre fort, reconnaissant et les yeux embués de larmes, en regardant la direction où j'ai vu Pierrot quelques secondes auparavant.

Ca fait tout drôle de retrouver tout ça. Je prends la colonne de feu direct pour le musée des horreurs, et je participe à la fête.

- Où t'étais passé ? me crie Kepa gladiateur face à l'absurde abberation scénaristique qui se trouve devant lui et s'avère pas avare en baffes non plus.

- En pause clope. On a dû se croiser.


C'était pas ma voix qui venait de parler. Trop sombre, presque caverneux, en tous cas trop rocailleux pour être moi. Ca venait de moi, mais c'était pas moi. Enfin, je crois.


- T'as rien ?

Boum. Gros taquet pour Flesh Godzilla.

- Non...'t toi ?

- Ca ira.

On frappe synchro. Il fait couler le sang, je le cautérise. La bête hurle. A deux c'est mieux. 
Je joue au sculpteur de flammes. Avec Kepa on repousse les limites du stylé, et une infime partie de moi, bien au fond, n'en revient pas. Alors qu'on atteignait un nouveau palier de fun, deux types sont arrivés en courant, flippés et à bout de souffle.

- Baptiste ! 

- Enfin ! haleta l'autre, plié en deux, les amins sur les genoux.

- C'est quoi ce délire ? s'est énervé Kepa.

Encore brûlant, j'ai reposé ma basse.

- On en sait rien ! Et puis vous êtes qui, vous ?

J'ai compris, mais mes lèvres restent désespérément fermées. Le feu retourne progressivement dans mon coeur.

- On était à un concert, a dit Kepa. Il s'est passé beaucoup de choses pas explicables, mais on a fini par atterrir ici après avoir ouvert une porte à l'étage d'un bar.

- Vous aussi ? a dit Fred.

- Pink Babies, ai-je fini par lâcher.

- Tu nous connais ?

- Bien sûr abruti. Je suis dans le groupe que vous avez agressé. On sait toujours pas pourquoi.

Comme pour nous maintenir dans l'ignorance, c'est le moment qu'a choisi le streumon pour nous sauter dessus dans un spasme nerveux, après avoir gentiment dégagé ses potes qui le tenaient par les bras. Sympa pour eux.

Cette fois on a détalé comme des lapins. Kepa devait lui aussi sentir les effets de la fatigue et le besoin viscéral d'un mode d'emploi des réalités alternatives. Il me dépasse, je me sers des colonnes de feu pour réapparaître ça et là et garder un minimum de distance avec le géant de chair à la culture musicale douteuse, mais bien vite, je me rends compte que ça sert pas à grand-chose. Mes forces commencent à m'abandonner alors qu'ons 'approche d'une espèce de crypte. J'y vois pas grand chose, il fait trop noir, mais pas question de ralentir, ni d'utiliser le feu. Je bute donc contre deux murets, dix blocs de béton et cent cailloux. Pain's back. Génial. Kepa prend à droite au-dessus de la crypte et je plonge à l'intérieur. Je cours sur les tombeaux, le gros freak pas sexy toujours sur mes talons. Je crois qu'il m'en veut d'avoir pensé ça. 

Mon bras me fait mal, Lenne devient beaucoup trop lourde et si je la tiens à deux mains je peux plus courir. Je retire tout ce que j'ai dit sur le budget effets spéciaux. On a rien à voir avec des superhéros.

J'ouvre une porte d'un coup de basse libérateur, poumons et spleen brûlants, et dans un dernier sursaut de force, saute par-dessus un muret pour me cacher derrière. Je retiens ce qu'il me reste de respiration. A peine le temps de compter cinq battements de mon diaphragme qu'un impact explose le mur voisin. Je me prends des éclats de terre plein la tête, les cheveux, le visage. J'entends la créature s'éloigner d'un pas lourd. Mon crâne bascule contre la paroi dans un soupir soulagé.

La Peur, Dan. Dan, la Peur. Vous vous connaissiez autrefois, mais vous vous étiez perdus de vue.



 

 





Dimanche 17 juin 2012 à 1:17

Retour des paratextes dans une période où tout va mal. Criez pas trop fort, je savais que ça vous avait manqué. Ceux qui ont pas decelé l'ironie dans la phrase précédente, vous sortez. Autant être honnête, je suis face à des difficultés qui me lassent d'une force suffisante à fermer le livre et raccrocher les jacks, et qui portent sur des choses que mon entendement ne me permet pas d'habiller avec des mots. Je tiens donc à remercier ceux qui me soutiennent dans ces heures difficiles et qui, rien que par leur façon d'être, me donnent envie de reconsidérer ce choix pour lequel je me suis laissé 1000 jours. 1000 jours pour décider ce que je vais faire de mon chemin. Ecrire ce chapitre m'a fait pas mal de bien, et je m'y attendais pas. C'est toujours bien d'être surpis, ça donne une raison de se mettre en sursis. Ca arrangera pas mes problèmes, mais ce soir, je me sens un peu mieux, et c'est en partie grâce à vous. Pour la plupart, vous vous reconnaîtrez dans ce chapitre. C'est pas volontaire, vu qu'il a été écrit y'a... pfwah, un an, je crois, et que même si j'ai rajouté de la matière, la plupart des références étaient déjà présentes dans la version d'origine. 

Autant vous prévenir, ce chapitre risque d'être aussi moyen que ce paratexte pue la mort et la tristesse incomprise d'un emo de 12 ans, par conséquent vous êtes toutes et tous invités à venir le critiquer, comme tous les autres chapitres d'ailleurs, ce que personne ne fait, mais bon, je le dis quand même, exprimez-vous bordel ! Ne laissez pas votre quotidien étouffer votre esprit critique entre deux tranches de facebook ou de pubs à la télé. Ne laissez pas votre mental dépérir comme un alcoolique vide ses bières - sans conviction. Criez, hurlez, riez, montrez que vous vivez. Vibrez, bordel. Un jour, vous en serez peut-être incapables. 






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Une veste marquée "Faith", une basse qui s'appelle Lenne, un zippo plus ou moins incontrôlable entre mes poumons, des émotions à moité de retour, une propension nouvelle à me foutre dans les situations les plus invraisemblables, un paquet de clopes déjà assez sérieusement entamé, des doigts-briquets, moi.

Et des trucs dans mes poches. Bordel, j'avais oublié ça. Je sors une des fioles en me défiant de pas me demander comment ça se fait qu'aucune ne soit abîmée, ni comment elles peuvent autant te remettre d'aplomb malgré leur si petite contenance. Et surtout pas pourquoi j'ai pas pensé à en boire un coup plus tôt. Surtout pas.

J'en avale une d'un trait et me sens revivre. Le feu se déchaîne dans mon corps tout entier. Je crie, j'hurle, j'exulte. Jamais il a été aussi fort, aussi agréable, aussi uni. Je découvre un nouveau niveau de bien-être.

Je soulève Lenne et nous éclaire jusqu'à la sortie.

La lumière au bout du tunnel. Mythique, magnifique, magnétique.
A mesure que je me rapproche, elle bouge. J'essuie mes lunettes et continue d'avancer entre les murs humides qui fument doucement sur mon passage. Mon regard émerveillé se durcit quand je sens mes forces disparaitre aussi vite qu'elles étaient revenues. Je titube, laisse à moitié tomber ma basse par terre, la fais traîner par terre, me rattrape aux murs glissants. Ma tête bourdonne, mes oreilles sifflent. Je lâche un râle et me cale une clope entre les dents. J'ai l'impression que la flamme qui me sert à l'allumer est mon dernier souffle transformé.
J'arrive pourtant à tirer dessus, péniblement. J'ai des douleurs dans à peu près tout le corps, je râle doucement à chaque expiration.

Les ondes de lumière se dirigent finalement vers moi. Doucement, lentement. 

Tranquillement elles m'absorbent et m'enveloppent. Subitement enchanté, je me retrouve transporté dans un néant brillant. Une voix.

"L'homme qui voulait choisir ouvrit la porte. Alors qu'il la contemple, l'esprit déterminé, le doute s'installe vaguement en lui. Il s'avance, en refusant de s'humilier."

"Et il reste pédant, ayant la volonté sans être conscient qu'il n'a pas la raison d'être de toutes ces choses, ni même la connaissance. Il passe le seuil."

J'existe encore ?


Explosion de lumière. Du blanc, du bleu, des ondes. Par milliers. Des gouttes d'énergie aussi. Ce plongeon était mortel, de quoi faire passer les grands 8 pour des trains électriques. La lumière me fait tournoyer dans tous les sens. Des éclats de feu s'échappent de moi alors qu'elle me propulse et me plaque.

Dans un lit.

Une voix reconnaissable entre mille m'hurle aux tympans entre deux gémissements. Je suis complètement nu et je crève de chaud. On transpire. Elle me regarde amoureusement de ses beaux yeux verts mi-clos. 

- On en est au quantième ? je m'entends dire en voix off, comme si le monteur avait cru bon de me rappeller ma dernière réplique, mais s'était un peu planté niveau synchro.

- J'ai arrêté de compter au cinquième, doudou, me glisse-t-elle dans un souffle, juste avant de se remettre à me grandir l'ego sous fond de joyeuse destruction auditive. Sa voix, comme son visage et son corps, me semblent plus que jamais au-delà de toute perfection. Mais "doudou", sérieusement ?

C'est le moment qu'a choisi mon cerveau pour se remettre à fonctionner. Si je viens pas de mourir, peut-être que j'étais mort avant, au moment de la fin du monde, et que tout ce que j'ai vécu n'est qu'une succession d'expériences liée à l'après-vie. Peut-être même que c'est ça, l'enfer, revivre encore et encore des moments heureux entre deux passages dans des salles de tortures remplies de monstruosités et de successions d'évènements incompréhensible. Solenne continue de crier, mais j'arrive pas à me concentrer pour autant. Mon corps et mon esprit semblent dissociés. Ou alors je suis mort mais une force inconnue m'a fait remonter le temps assez loin pour me donner une deuxième chance. Me dis pas que ça va être à moi d'éviter la fin du monde, je le vois venir à des kilomètres et c'est hors de question. Je suis qu'un môme, bourré de questions qui me tordent l'esprit dans tous les sens, mais un môme quand même.


- T'as encore battu ton record, mon chéri. Faut arroser ça.

Quand je dis que je sors avec la fille parfaite. Sonia me sermonnait toujours là-dessus, sur le culte de la performance, en râlant sur mon manque d'humilité quand je lui racontais mes soirées spaghetti / ciné / restau / sexe. Elle disait que c'était pas sain d'avoir quelqu'un qui te rappelle régulièrement que tu règnes au pieu et que t'es le maître du monde sous les draps. Que si ça t'empêche pas de t'améliorer, ça favorise pas non plus les remises en cause. Et toujours le même regard qu'elle me lançait quand je lui disais que je me déteste suffisament, voire trop, pour risquer ce qu'elle me prédisait. Et effectivement, il avait fallu aller jusqu'aux super-pouvoirs pour que je me croie au-dessus de tout. 

Pour l'heure, c'était au-dessus de Solenne que j'étais, nimbé du plaisir partagé, grognant de bonheur, des spasmes parcourant mon corps tout entier. Au sommet de sa poitrine pulpeuse, ses tétons dardaient vers le ciel jusqu'au fond de mes yeux enivrés de désir. 
Mon cerveau s'était tu.  

Qu'est-ce que c'est bon d'être en vie.

Un flash noir obscurcit ma vision. Je pars loin, très loin. Je me sens presque prêt à quitter mon corps. Quand je rouvre les yeux, je me retrouve à genoux, la tête de Solenne au-dessus de mon nombril avec une main derrière les oreilles pour retenir ses cheveux, comme en transe dans un va-et-vient incessant de haut en bas. Je m'abandonne au plaisir acméen qui m'amène dans un équilibre étrange entre le ciel et la terre.

Et là c'est moi qui hurle, abandonné aux talents de cette ange qui partage ma vie et l'illumine un peu plus chaque jour.

Elle s'allonge doucement et je m'effondre à ses côtés. 


- Tu es à ma vie ce qu'Amanda Woodward est à Melrose Place, finis-je par lâcher dans un souffle rauque, la gorge et la bouche asséchées par ce que Sonia appelle sobrement la "compétition vaginale".

- Hey, c'est pas cool, ça !

Elle me met une bourrade dans l'épaule et on se marre comme des gosses. 


- C'est un groupe génial, je te ferai écouter.

- C'est ça, rattrape-toi !

- Mais j'te jure, c'est pas des blagues !

- Mouais...

- Tu verras. Alors, c'était comment ?

- Rooh... tu recommences ! J'te le montre pas assez ou quoi ?

- Je sais, j'suis lourd avec ça...

- Pas qu'avec ça, j'te rassure !



Elle rit. J'ai mal. Nous sommes heureux. 

Nous sommes heureux et j'en paie le prix, sans savoir qu'elle casque beaucoup plus que moi, chaque fois qu'on se voit représentant pour elle une occasion de se mettre à découvert, même involontairement.

J'essaie de m'empêcher de repenser à tout ce qui s'est passé avant que je me retrouve en elle. C'est la deuxième fois que je me retrouve dans le passé. Ca doit peut-être se reproduire encore. Ca collerait avec l'idée que je suis mort, que ce soit depuis le début ou tout récemment.


- Dan, j'avais encore jamais joui comme ça, a-t-elle fini par dire.

Ha ben ça fait plaisir ça, tiens. Pensées coupées. Je respire.

- D'où le...
 ?

Je pointe mon index vers mon entrejambe sous les couvertures.

- En partie.

- Mais quelle salope.

- Hey !

Morte de rire, elle me jette un oreiller sur la tronche et m'attrape la queue avant que j'aie pu faire quoi que ce soit d'autre qu'afficher un sourire probablement très niais sur mes lèvres anhydres.

- Alors, qu'est-ce que t'as à dire, maintenant, hein ?

Elle rit toujours. C'est communicatif.

- Je boufferais bien un pot de Nivéa.

Elle me fout une petite baffe sur le bout du gland.

- Ouga !

- Désolée ! J'voulais pas te faire mal...

- C'est pas grave, répondis-je un peu crispé.

Elle me donne un long baiser et part chercher la bouteille d'eau et les clopes. Solenne ne fume qu'au lit, et après l'amour. Ou avant, mais rarement. C'est le moment de rassembler des données.

- Tu sais que c'est celle-là la plus dangereuse ? Elle va directement dans le sang.

- Je m'en fous, c'est ma seule. Pas comme certains !

Bon. Tentative d'obtenir de quoi y voir plus clair sans paraître bizarre.


- J'ai quand même vachement réduit depuis qu'on est ensemble. Ca fait combien de temps, déjà ?

J'aurais peut-être dû la jouer deuxième degré.

- Tu déconnes ?

Merde.

- Tu devrais le savoir, reprit-elle, le regard légèrement assombri. Pourquoi tu me demandes ?

Et là, j'suis censé faire quoi ? Lui dire la vérité ? Non mon grand.

- Je sais pas, comme ça... Je suis pas très dates. [Prier pour que ça passe] Ca doit faire au moins 8 mois, je dirais...

- Ca fait un an, banane !

Oups. En même temps, j'avais aucun élément pour m'aiguiller. Ah si, des albums de Tang et de Sugartown que je lui avais offerts pour l'occasion, qui trônent sur son bureau. Soit la tempête de lumière m'a repris mon sens de l'observation, soit elle m'a déconnecté du réel.

- Je t'ai dit, j'suis mauvais en Histoire.

Elle rit encore. C'est moi qui la rend heureuse comme ça ?

- Tu me rends heureuse.

Et ben au moins je suis foutu de mettre dans le mille sur un point. Vive moi...

- Non, c'est toi qui me rend heureux. Celui qui te rend heureuse, c'est ton amant.

- Mais c'est toi mon amant, andouille !

Non, me dites pas qu'on a VRAIMENT eu cette conversation guimauvause en rose fluo ?

- Tu trompes un mec avec moi ? DEPUIS TOUT CE TEMPS ??

- Mais non, soupira-t-elle, y'a que toi....

- Je voulais sortir une vanne vaudevillesque, mais tu me fous le doute. C'est vrai ?

Ah ouais quand même. Guimauve + lourdeur = mauvais Dannie. Pas bien... Après on s'étonne que tout le monde ait laissé tomber l'histoire.

Pourtant, mon coeur commence à battre très fort dans ma poitrine. Autant pour la perte de connexion au réel, je suis vraiment devenu con avec tous ces trucs à base de monstres, de feu et de lumière.

Elle m'a regardé droit dans les yeux. 

- Oui. Il n'y a que toi. Normal. Tu veux des arguments ?

Pouah, bordel. Ca va finir en livres pour enfants, cette histoire. J'ai vraiment été comme ça ? Et comment ça se fait que je dise exactement les mêmes choses que quand ça s'est passé ?

Elle me caresse doucement le visage, le sien porte une expression préoccupée. Y'a pas à dire, elle m'aime vraiment. Pauvre Solenne...

- Tu mérites mieux, lâchai-je en lui tournant le dos.

- Arrête....

Elle m'a enlacé doucement et pris la main.

- Même s'il y avait mieux, j'en voudrais pas. Du är den rätte.

Deuxième flash direct dans ma gueule. Elle a dû le sentir.

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Orj, tu fais de la merde, là. En plus ça traîne en longueur, ton truc. Trouve quelque chose, vite.

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- Tu connais la différence entre faire l'amour sur un bâteau et la bière sans alcool ?

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Noooon, pas ça....

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- Noon... dit-elle en riant doucement.


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STOP ! STOOOOOOP !!
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- It's fucking close to water.

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Non, mec, non. Trouve autre chose, vite. Ils vont pas tarder à zapper en masse pour aller chez Atom, là. En plus il offre la bière et ses dessins sont cool. Alors tu te démerdes, mais tu me fais mieux que ça.

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Elle rit encore. Mais pas de ce rire stupide qu'a, hélas, une majorité de filles. Non, jamais. Elle a toujours une forme intelligente de rire. J'aime ça. 


Silence.

- Ca faisait longtemps que je t'attendais. Je commençais à me demander si t'allais venir.

- C'est beau. Je pourrais dire la même chose, mais ça serait du plagiat.

- Je l'ai pas vue passer, cette année...

- Moi non plus, t'as pas idée.

Elle a eu un regard surpris, prête à poser une question. Puis elle a soupiré d'aise.

- N'empêche, à chaque fois tu m'envoies dans une autre dimension.

J'ai eu un sursaut et me suis retourné vers elle. Garder le calme. Le retrouver, plutôt. Me plonger dans la contemplation d'elle.

- Comme une réalité alternative ?

Maïeutics in bed, experiment 1. 

- Ouais, voilà. Exactement. C'est fou, t'as mis le doigt dessus. 

- J'ai juste dit ça au hasard...

Essayer d'avoir l'air naturel.

- Y'a pas de hasard.

- C'est pour les noobs.

- Absolument.

- Donc oui, une réalité alternative. Où tout est beau, parfait, ordonnée. Je la sens du bout des doigts, enfin, du bout de mon âme, si on peut le dire comme ça. Mais je reste toujours aux portes, en quelque sorte. 

- Le paradis ?

Elle a souri.

- Ouais. Si on veut.

Une pensée m'a claqué dans la tête. Si je suis mort, peut-être que rien de tout ça n'est réel et que je le sais au fond de moi, de mon âme, justement, et que du coup, je cherche des indices dans ce qu'elle pourra me dire parce qu'elle est aussi un produit de cet univers virtuel dans lequel je me suis retrouvé propulsé, que ce soit par la lumière ou la fin du monde.

Elle s'est blottie contre moi et je l'ai embrassée. Continuer à jouer le jeu, si c'en est un.

- Et l'enfer ?

- Je pense pas que ça existe. Mais si c'est le cas, ce serait sans doute un monde étrange et sombre. Peut-être trippant aussi, mais fondamentalement malsain. Avec des monstres, aussi, je pense. Peut-être même vaguement humains. Une sorte de matérialisation de ce qu'on a de plus sombre au fond de nous.

Elle me glace. J'essaie de parler plus fort que mes battements cardiaques.

- Et si jamais un truc comme ça existait, on pourrait s'en sortir ?

- Je ne sais pas. Je sais juste que la lumière est la plus forte.

Ouga ouga in my mind. Booyaka burnin' in my heart. 
J'aime cette fille plus que tout au monde, mais là je voudrais repartir sauver les autres, en sachant comment jouer au héros cette fois. Elle a balayé toutes mes questions en une seule phrase sans le savoir. Je crois avoir enfin ma réponse. En tous cas c'est ce que dit la chaleur en moi. 

Pourtant, pas de Deux Ex Machina pour moi cette fois. Je reste désespérément cloué au lit avec la femme de ma vie, d'autant qu'à ce moment, j'étais encore censé l'ignorer. De mes rêves alors. Ouais... ça colle carrément.

J'ai souri, apaisé.

- Hé, ça va ? T'as l'air bizarre.

- J'me suis jamais senti mieux.

- Alors tout va bien, sourit-elle.

Oui. Tout va bien. Dans les meilleur des blablablabla. Mais il faut cultiver notre jardin. On se dit "je t'aime", et la vérité du sentiment et du moment me réchauffe le coeur encore davantage. 

On s'est endormis.









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