Un tout petit paratexte pour ce chapitre, j'ai peur de trop vous en révéler avant même que ça n'ait commencé.
Il est possible que j'ai laissé quelques incohérences, donc n'hésitez pas à me les faire remarquer.
Pour les critiques, lettres d'amour, menaces de mort etc, vous savez où ça se passe.
Lâchez un petit commentaire et hop ! C'est magnifique, c'est merveilleux, comme chez Nikos.
Bonne lecture les ptits lapinous !
Orjan, qui va se coucher.
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- Chérie, c'est décidé, j'tinvite chez Mc Gerbal...
...Ah ouais, c'est vrai, t'existes pas.
Salut toi. J'm'appelle Soda, et c'est moi qui vais raconter ce chapitre. Je sens qu'on va bien se marrer, tous les deux. Parce que quand on est dans une histoire de fin du monde, c'est un peu comme quand on se partage une fondue.
C'est convivial, ça rapproche les gens, mais on y voit pas grand-chose.
Alors pour que mon personnage ait une quelconque utilité, je vais vous expliquer quelques trucs. Et pour avoir un peu plus d'épaisseur, je vais me présenter : je m'appelle Soda, j'ai 207 ou 208 ans. Je sais jamais.
Face à ton air ahuri, je m'explique : Je ne bois que des boissons gazeuses, genre Coca ou Dr Pepper. D'où mon nom. En fait c'est mon surnom. Je sais jamais.
Ah oui, je suis un démon. C'est peut-être bon de le préciser (quoique, si tu as lu les premiers chapitres de Kepa, tu devrais déjà le savoir). Et celui qui prononce le nom d'un démon devient un démon à son tour. Et c'est très dangereux. C'est pourquoi j'ai décidé d'oublier le mien. De toute façon plus personne ne s'en souvient.
208 ans (ou 207) c'est encore jeune pour un démon. Je suis pas particulièrement sage ou expérimenté, comparé aux autres. Je passe le plus clair de mon temps ici, à Shell Haven, à analyser les destins et contrôler le cycle des âmes.
C'est mon rôle. Ensuite je fais des rapports à Karma, qui va décider d'envoyer des Banshees ou des Damantes, selon le cas. Ces races ont de grands pouvoirs, et elles servent à équilibrer l'univers, pour éviter qu'un jour tout se casse la gueule.
Comme mon travail est plutôt simple (hey, j'suis un démon baby, oublie pas !) , je peux me permettre de passer le moins clair de mon temps avec des succubes (des démones, baby !) ou, plus rarement, sur Terre.
J'y vais pour profiter des paysages et fuir un peu la routine du boulot. Mais je dois me déguiser en humain pour ça, et c'est plutôt embarrassant.
Donc là , j'étais au bureau, dans la tour de Karma, à Shell Haven, les deux pieds sur le bureau en train de rêvasser quand quelqu'un a frappé à ma porte.
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C'était la première fois depuis des lustres.
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Et ce fut Karma en personne qui entra.
- Salut, Soda. Ca va comme tu veux ?
- Ca pourrait être pire. Et toi ?
- J'ai des problèmes avec les maillons de ma chaîne.
Ah ouais. La chaîne de Karma.
Comme son nom l'indique, Karma est... ben... pas vraiment palpable. Sauf quand il le veut bien. C'est une entité multiplanaire, qui se matérialise dans la forme qu'il veut, quand il le veut, suivant un rituel bien précis : rester insaisissable, frapper au bon endroit quand on ne s'y attend pas, et surtout, conserver l'ordre des choses.
Il représente plus ou moins la même chose que le Cosmos pour les Grecs et Dieu pour les catholiques.
Karma est une sorte d'immense network énergétique qui circule entre les gens, les choses, les idées, les faits. Les athées l'appellent Destin.
Et ici, à Shell Haven, dans un plan supérieur à celui de la Terre, Karma ressemble à un homme comme les autres. Ou alors à une femme. Ca dépend des jours.
Pour quelqu'un qui est habitué à tout ça, c'est franchement bizarre qu'il y ait un soucis dans un truc si bien rôdé. C'est même presqu'impossible.
Karma lut mes pensées à travers mes yeux écarquillés.
- Impossible is nothing...
- Même quand on s'appelle Karma ?- Justement, c'est à ça que je sers.
- Alors tu vas faire quoi ?
- D'abord, je vais t'expliquer ce qui cloche.
- OK.
- Cela fait maintenant 10 ans qu'un esprit inconnu vit sur Terre. Tu vois de qui je parle ?
- Ouais, Sébastien Andero, hein ?
- Effectivement, c'est lui qui l'a créé.
- Mais ça, on le savait déjà depuis longtemps. Pourquoi t'es venu me voir alors ?
- Parce que c'est normalement impossible qu'un humain créé un esprit. Surtout de cette envergure. Et que, fatalement, cet esprit va tenter de prendre possession de son corps.
- Mais on sait pas ce que c'est comme esprit ! C'est super dangereux d'intervenir maintenant !
- Justement. C'est peut-être un démon incorporel. Il suffit qu'il obtienne un corps pour que la Terre devienne une usine à cauchemars.
- Alors on fait quoi ?
- Moi je parle, et toi tu m'écoutes. Apprends la patience, Soda.
Je me suis tu. Ca me faisait bizarre dans le ventre. Comme si j'allais aller sur Terre pour autre chose que ses déserts arides, ses forêts luxuriantes et ses sommets enneigés. Devinant mon inquiétude, Karma a repris la parole.
- Il y a encore autre chose. Tu m'as rapporté récemment que la Terre allait droit dans le mur.
- C'est vrai.
- Pollution, crises économiques, guerres... Si la Terre disparaît, on va perdre un plan entier.
Un plan est un ensemble de strates et de destins liés. Théoriquement, il est possible de visiter l'ensemble des strates d'un même plan, à condition d'être suffisament fort mentalement pour ne pas s'y auto-emprisonner. C'est pour éviter cela que seuls quelques rares humains ont le pouvoir d'ouvrir ces portes.
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- Et là , c'est le drame.
- J'dirais même que c'est la merde. Si on ne fait rien, on va avoir droit à la fin du monde.Â
Karma qui parle de fin du monde. Collector. Le genre de truc qu'il faudrait filmer et revendre au plus offrant.
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- Tout ça à cause d'un fantôme ?
- Exactement.Â
Â
J'ai réfléchi. J'en ai pas vraiment l'habitude. Le cerveau d'un démon fonctionne assez différement de celui des humains. Donc on peut pas dire que mon boulot d'analyste me demande trop de prises de tête. Je dois même être plutôt con par rapport à la moyenne. Faudra que je me renseigne.
- Et si on débridait les humains ?
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Ca fait aussi partie de mon boulot. Recenser les débridés. Des humains qui ont dépassé leur condition pour ouvrir des espèces de portes vers les strates. Ca paraît dingue, mais il se produit un truc analogue quand une personne dans le coma a une EMI. L'espèce de tunnel avec la lumière au bout et les p'tits éléphants qui shaggent gaiment, c'est une porte, si on veut. Bon, sans les éléphants, mais l'idée est là .
Et donc, si on débride les humains, ils vont aussi se mettre à développer des pouvoirs en rapport avec leur personnalité.
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- C'est pas une mauvaise idée. Une autre ?
-Â Les gardiens ?- Bien !
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Désolé, les discussions à Shell Haven c'est spécial. Desfois on peut pas tout comprendre.
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Pour faire simple, tout le monde sur Terre a un pouvoir bridé par nos soins, à cause de la fâcheuse tendance des humains à l'insatisfaction permanente. Des qu'ils goûtent au pouvoir, c'est fini, ils en veulent toujours plus, et ils meurent malheureux. Et beaucoup d'autres humains meurent malheureux par la faute d'un seul d'entre eux.
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C'est tragique.
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On a pris une deuxième mesure au cas où. Les gardiens. Le genre de personne qui vous guide et vous rend espoir quand tout va mal. C'est aussi le genre de personne qui va à chaque fois éviter le pire, sauver les meubles, récupérer le chat dans l'arbre, éviter une troisième guerre mondiale, etc.
- Mais y'a un problème...
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Les gardiens sont des bridés comme les autres. Sauf que leurs pouvoirs sont suffisament grands pour transparaître malgré la bride. Mais c'est rien d'extraordinaire, en apparence.
- Je suis con, bordel ! J'te parle de débrider les humains et toi tu me dis que c'est une bonne idée !
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Quand je te disais que j'étais con...
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- Si on fait ça, ils vont détruire tous seuls leur propre monde ! On peut pas les laisser faire ça !
- Alors faisons-le à leur place. Comme ça nous détruirons ce qui doit être détruit, et nous conserverons ce qui doit être conservé.
- T'es dingue ? Ca va être un bordel sans nom !
- Peut-être mais ça va arranger les choses. En traversant les strates, les gens arrêteront de s'ignorer. Et ils prendront aussi conscience de beaucoup d'autres choses. Ils apprendront à se connaître, et à connaître les autres, aussi.
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J'aime pas quand il fait ça. Expliquer la même chose de plusieurs façons différentes.
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- C'était dans le plan ?
- Je ne peux pas te répondre. Disons que maintenant ça l'est.Â
Le plan, c'est en quelque sorte le destin. Mais ici point de fatalité. Juste une certaine liberté.
- Soda, je veux que tu partes en mission sur Terre.
- Je peux refuser ?- Tu peux. Mais tu iras de toute façon, tôt ou tard. Car bientôt le monde réel et Shell Haven ne feront plus qu'un. Et tu ne voudrais pas rater un bon concert, hein ?
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