Quoi ? Présenter le chapitre du jour. Ouais, c'est vrai. Bon, ben voilà le chapitre 30, hein.
Comment ça, en dire plus ? Putain, t'es chié, toi. Rappelle-moi pourquoi je te paye ? Exactement, pour me motiver à faire de bons paratextes. Et là , tu m'emmerdes plus qu'autre chose. Je vois d'ici ce que les gens vont se dire direct. Ah, il est malheureux, c'est un artiste incompris, blablabla, assorti de toutes les merdes préconcues qu'on sort dans ce genre de cas. Du jugement, rien d'autre.
Et j'en ai rien à foutre, de tout ça. Surtout quand ça vient de personnes qui comprennent pas que le goût du bonheur s'apprécie vraiment que quand on connaît le malheur sur le bout des doigts; et que le pire, en fait, c'est d'être précisément pile entre les deux, dans cet état presque neutre, insensible, hors de tout, éloigné au-delà de tout cadastre.
Alors vous comprendrez qu'aujourd'hui, j'ai pas envie de faire de paratexte sympa, joli, ou tout simplement supportable et lisible. Passage à vide, rien d'autre, j'attends juste avec plus ou moins d'impatience le prochain accord, la prochaine note, la prochaine pêche, le prochain miracle, tout ça, tout ça. Et non, je ne pleure pas tout seul dans mon lit comme une personne respectable.
Ne laissez jamais un(e) ange s'éloigner de vous.
Bonne lecture.
Orjan.
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"Bonsoir et bienvenue dans le service réseau de l'Entremonde. Vous ne pouvez pas joindre votre correspondante pour le moment. Progressez et réessayez."
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Et le prix Nobel du répondeur téléphonique le plus bizarre est décerné à à à ... DAAAAAAAN LEEEEEEEEDOOOOOOO !!! Bravo, bravo, TOUTES nos félicitations !! Discours ?
Assemblée qui se lève et qui siffle, applaudissements assourdissants, cris, hurlements à base de "whooohoooo !!"
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J'ai rangé le portable, mis deux clopes dans ma bouche, les ai allumées avec deux doigts et en ai tendu une à Sonia.
- Apparemment, on chie dans la colle, a-t-elle asserté après une bouffée.
Le lecteur attentif notera la subtilité caractéristique du personnage, censée cacher toute sensibilité énervée par la situation présente.
- Peut-être seulement pour l'instant. C'est pas ça qui m'énerve.
- Alors c'est quoi ? Pour que tu foutes le feu à une poubelle innocente après avoir raccroché ?
Oups. J'vous l'avais pas dit, ça ?
- Ce répondeur, c'est du foutage de gueule. On est dominés par quelque chose ou quelqu'un, et qui nous le montre.
- Dieu cynique ?
- Possible.
- Ou comme tu l'as dit, quelqu'un qui se fait passer pour Dieu.
- Possible aussi. Peut-être les deux. Le clown a dit beaucoup de choses, mais on sait pas où trouver Karma, si c'est bien une personne ou une entité visible avec laquelle on peut interagir. On sait même pas s'il est trouvable...
- Arrête. Tu penses trop et tes pavés emmerdent les lecteurs. Fais plus sobre.
Je me suis donc transformé en feu (Sonia est terrible quand elle râle) et j'ai brûlé dans l'air, de plus en plus haut. C'est une forme étrange, une expérience étrange, une sensation étrange. Bref, c'est du concentré de zarbe brut. Avec de vrais morceaux de fun dedans. Je me sens étonnamment puissant. Au bout d'un moment, j'ai les oreilles qui sifflent. Je reste donc intrinsèquement humain, malgré mon apparence de feu de cheminée restylé à coups de distorsion dans l'oxygène. Bonne nouvelle. La bête n'apparaît qu'avec la rage. Normal, et gérable. Un être humain en exacerbé. C'est probablement ce qu'on est tous depuis la fin du monde.
Vu du ciel, on dirait pas que c'est le cas, d'ailleurs. Je veux dire la fin du monde. Je me doutais pas que l'apocalypse serait si étrangement cool. Même si c'est pas facile d'être ici en compagnie de questions plus que d'autres gens.
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Et qu'est-ce qu'elle a dit, Sonia ?
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Ouais, bon, ça va hein. C'est compréhensible, ce que je raconte.
D'ailleurs, des gens, y'en a. Tout bas, dans les rues, un peu plus loin, à même pas un kilomètre. Pas de voitures. Pas de monstres non plus.
Je suis redescendu.
- Rien d'inhabituel.
Je lui ai fait le topo vite fait. D'après ce que j'ai vu, pas le moindre bâtiment suffisament gigantesque pour ranger un dieu. Pas de structure du genre blindée d'un halo de lumière violette et autres effets spéciaux suffisants pour attirer n'importe quel mouton dans la salle de cinéma la plus proche pour payer un prix hallucinant caché derrière l'argument "film en 3D". Le pire c'est que ça fait plus de 15 ans que ça dure.
En même temps, un dieu dans un building, même au dernier étage, faut avouer que ce serait pas banal.
- T'avais vraiment besoin de faire ça ?
- Ouais. Questions de limites. Les connaître pour pouvoir les repousser.
J'ai pensé qu'elle ferait bien d'en faire autant. Qui sait ce qui peut se passer si je me retrouve une fois de plus incapable de la protéger ?
Même si je suis devenu plus fort, ça change rien, je suis sûr.
- Arrête de te prendre la tête.
Putain comment elle fait ?
- J'ai pas lu dans ta tête, juste dans tes yeux. Je te connais, petit frère.
- J'vois ça...
J'ai ramassé ma basse et lui ai fait un signe de tête en direction du groupe de personnes que j'avais vus d'en haut.
- Y'a des gens, pas loin.
Sonia a gardé le silence. Je me suis approché d'elle en ravalant le "Hey, ça va ?" qui me taquinait les cordes vocales. Elle s'est assise par terre et à commencé à pleurer, alors que le ciel se couvrait et que les premières gouttes de pluie noircissaient le bitume illuminé par les premiers éclairs.