Vendredi 7 mars 2008 à 21:47

Où l'auteur assume enfin sa place de scénariste et nous présente le narrateur, où l'on part dans des considérations sexuelles sur les superhéros qui ont bercé notre enfance trop près du mur, et où on aura le plaisir de retrouver le plus grand animateur sportif et bilingue du monde
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- Et il reste pédant, ayant la volonté, sans même être conscient qu'il n'a pas la raison.

- Et il vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants.

- Et ça... et ça.... et ça commence....

J'avais connu des nuits plus agréables. Ca me fait ça à chaque fois avant un concert, et demain, on fait notre premier Kraka. Je me demande si Soso a changé mes cordes... Je me demande ce qu'on joue... Je me demande à quelle heure...

Putain d'bordel de merde.

- JE SUIS OU ???

- Gnaaa... t'es sur ma jambe, et tu me fais mal.
- Oh, pardon.
- Pourquoi tu gueules comme ça ?

Elle était encore à moitié endormie, je frisais la catastrophe nucléaire si je lui disais ce qui va pas.

- Rien, j'ai juste fait un cauchemar...
- Bonne nuit...
- C'est ça, bonne nuit ma puce.
- Mmmm...

Le cauchemar c'est que j'ai pas appellé Kéké... Et merde.

J'ai sauté dans mes fringues sans faire de bruit, façon Batman, tu vois, mais en moins gay. J'ai attrapé mon téléphone et j'ai sauté dans la cage d'escalier. Si j'avais été Batman, ça aurait été la cage aux folles.

J'ai mal dormi, mais je fais des blagues quand même. Le concert sera bon. Ou pas.

J'attrape mon téléphone, j'appelle en vitesse Kéké.

- Kéké, c'est à quelle heure les balances ?
- Bah, 20h30, on avait dit, non ?

J'avais envie de l'embrasser. Enfin, non, je suis pas Batman, suivez, un peu.

- Ok, ça déchire, donc on mange au Kraka, c'est bien ça ?
- Bah ouais, c'est ça. Hé, zeeen, mec.

Ouh Yeah.

-
Ben c'est génial alors. La biz, A+.
- La biz.

Sclic.

Magnifique, great ! Il a tout remis dans l'ordre des choses, Incredible, it's incredible, il nous sort sa fameuse danse de la victoire, ah qu'il est beau l'artiste, à tournoyer sur lui-même comme un derviche ! Qu'il est grand d'avoir ainsi sauvé la situation et qu'il est

Coupure de pub. Ou plutôt retour à la réalité.

Encore lui. Le petit garçon Noir.

- Tiens, salut, toi.
- Ca commence.

J'ai déjà entendu ça quelque part...

- Tu joues trop à FF, toi...
- N'aie pas peur.

Il a disparu façon Garcimore.

Et avec tout ça, faut que j'appelle Kepa...

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Dans cet interlude passé sous silence, nos amis vont en cours. C'est cool, hein ? Moi non plus, j'en ai pas grand chose à foutre. Je suis le narrateur, enchanté.
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20h pile. Les emmerdements commencent.

Remettre la main sur la setlist. Prendre la pédale multieffets. Nettoyer la housse avant d'y mettre la basse. Casser les dents du type qui a écrit dessus.

LE

Hé ben. Pourtant personne est venu à la maison depuis que j'ai remarqué le
L la dernière fois. C'est peut-être une blague de Soso... Je lui casserai peut-être pas les dents, finalement...

Allez, un coup de chiffon sur ma quatre-cordes et hop, emballé, c'est pesé.

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Ouais, super. Alors nous retrouvons tout de suite Nelson, pour la descente en rappel de l'escalier.
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- Yes Patrick, je disais oui Patrick, c'est un évènement sportif sans précédent dans la route vers la gloire de Dan, qu'il attaque avec une dextérité surprenante ! En effet, Indeed, il se jette au milieu du vide de la cage d'escalier avec sa basse sur le dos, au risque de l'abîmer car il est en retard, yes, he's late !! Il s'agrippe aux barreaux rouillés au risque d'attraper le titanic et de mourir dans d'atroces souffrances, le corps gelé de toutes parts, mais non, lui il s'en fout et descend a toutes vitesse les cinq étages comme un singe, oh, c'est magnifique ! Il est arrivé au quatrième étage, non, au troisième, que dis-je, au deuxième, il atteint le premier, il va toucher terre mais !! mais !! mais !!
Oh, quel malheur ! What a shame ! Oh non non !! Fuck motherfuckin' Fuck !! Sa basse s'est coincée ! His bass is stuck in the stairway ! dans l'escalier. Il pendouille maladroitement dans le vide, sa basse va-t-elle se briser ? Oh quelle tension, mes amis, quel intense moment de sport !! Je bande comme un âne !!
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- Euh, Nelson ?
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- Mais ! Mais ! Mais ! Sa basse semble se détacher de la rambarde ! Elle est brisée ? Mais non ! Elle est même toujours dans sa housse ! Rah Patrick, quel émotion, quel beau moment de sport ! C'est sublime, c'est le genre d'évènements qui ne se produisent qu'une fois dans une vie ! DAN EST VIVAAAANT !!!
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- Nelson, ça va ?
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- OUUUUUI !!! IL SE JETTE HORS DU VIDE COMME UN SPORTIF DE L'ESPACE !! RAAAH C'EST SI BEAU !!! IL SE RATTRAPE AU SOL AVEC UNE DEXTERITE ET UNE CLASSE INCOMPARABLES !!! QUEL HOMME  !!

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Ouais, ben avec tes conneries, j'ai sûrement ruiné mon manche moi...
Je l'ai sorti, inspecté un peu - façon Columbo - et j'ai halluciné ma mère.

Rien. Pas une éraflure. Rien du tout.
Faudra qu'on m'explique...

Allez, j'me téléporte au Kraka en vitesse.

Non je déconne. J'y suis allé à pied.




Samedi 8 mars 2008 à 18:38

Où on commence par un clin d'oeil pour finir avec un autre clin d'oeil, et où on trouvera entre les deux toutes sortes de blagues nulles, de jeux de mots bidons, où les pièces du puzzle commencent à se montrer, où le côté "délire collectif dans un ascenceur en écoutant Tool" se prononce encore un peu plus, et où les clins d'oeil à GTO dans le paratexte devraient commencer à vous amuser.

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20h Pile. Les emmerdements commencent.


Je sais pas si vous avez remarqué ça, mais à l'école, c'est toujours celui qui habite le plus près qui est toujours en retard. On appelle ça l'axiome de proximité croissante. J'habite à 15 minutes à peine du Krakatoa, où on a un concert de prévu. Et évidemment, j'avais promis à Kéké, notre ingé son, de venir en avance pour monter la scène en attendant que les autres arrivent pour les balances. Le soucis, c'est qu'on est pas trop potes avec les Pink Babies, qui jouent après nous. Et comme ils jouent après nous, ils aimeraient bien prendre notre place, ça leur permettrait de faire genre "on est les meilleurs, donc on joue les premiers."

J'ai rien contre ces trous du cul. Simplement je les supporte pas.
Mais là, ça allait faire un quart d'heure que j'étais avec deux d'entre eux. Le batteur et le chanteur. Et si ça continue, j'vais être à la bourre. Bien sûr, dans des cas comme ça, je suis forcément toujours tout seul.

Retour en arrière.

19h45. Tout allait bien.

J'étais en avance en plus. J'habite à deux rues de la salle, mais ça m'empêche pas d'avoir la peur au ventre. C'est bizarre ça, c'est le genre de sensations qu'on garde pour les grandes occasions.
Mes mauvais pressentiments se vérifient toujours.

Et là, c'est Baptiste et Fred, des Pink Babies, qui marchaient derrière moi. Je les avais vus, mais je pensais qu'ils voulaient juste me foutre la pression. J'ai enlevé mon casque des oreilles, ce serait bête qu'ils m'aient par surprise...

Mais non, ils ont rapidement tourné et ont disparu.

J'ai respiré un coup. Je battrai le coeur tranquille ce soir.

Et ils ont surgi d'une ruelle à deux centimètres de moi. Baptiste, le batteur, m'a attrapé par le call-back et m'a plaqué contre un mur.

20h Pile. Les emmerdements commencent.

- Hééé... Tu sais qu't'es en avance, toi...

Je suis resté paralysé par la peur. Baptiste est très costaud, et il joue là-dessus. Sur mon cou aussi. J'ai mal.

- Tu sais qu'on joue après, hein... Tu sais aussi qu'on est meilleurs que vous.

J'ai pas parlé

- Tu m'entends, connard ? J'tai dit qu'on était meilleurs que vous !! Dis-le !

Vas te faire foutre connard.

- DIS-LE !

- Vous êtes meilleurs que nous...


- Haaaa.... C'est bien, il reconnaît qu'il est nul, hein...


Fred ricanait derrière. J'avais envie de pleurer. Mais Solenne serait pas là pour essuyer mes larmes.

- Lâche-le, maintenant...

Baptiste a obéi.

- Tu sais quoi ? Tu vas appeler ton connard d'ingé son, et tu vas lui dire que finalement, vous jouez après nous ce soir, a dit Fred d'un ton sec.


J'ai regardé autour de moi.
Il était là.
Il voulait que je fasse quelque chose.
J'avais pas le choix.
Je devais le faire.


J'avais plus peur. Il serait là pour m'aider en cas de problème. Il a souri, et a hoché la tête quand j'ai remis mon casque sur les oreilles.


"
push normal, your cock's inside, do those things work? ...thats kinda why im talking to you ...it's hella sensitive..."

Mon mp3 m'a envoyé When Girls Telephone Boys direct dans les cages à miel. J'ai balancé un coup de pied droit dans la tête de Baptiste, qui a reculé sous l'impact. J'ai attrapé Fred par le call-back et je l'ai frappé très fort dans le ventre.
Mais je me suis pas arrêté là. J'ai repris Baptiste par les cheveux, et je l'ai frappé là où aucun homme au monde n'aime être frappé. Il s'est écroulé en poussant un cri aigu. J'ai mis un coup de pied circulaire dans le ventre de Fred, et je me suis barré en courant.

Ca m'arrive parfois de perdre les pédales comme ça. Je suis arrivé au Kraka le coeur battant. Solenne était là.

- Seb, qu'est-ce qui t'es encore arrivé ?

Elle m'a pris dans ses bras et je me suis mis à pleurer doucement. Solenne est la soeur que je n'ai jamais eue. Elle est toujours là quand tout va mal.

- Tu sais que tu ressembles à Lennie ?
- Ouais, je sais, ai-je dit avec un sourire en dessous des larmes. Tu l'dis tout l'temps...

L'an dernier, Solenne avait lu Of Mice and Men de Steinbeck, et elle avait beacoup aimé. Elle m'avait offert le livre pour Noël.

- Alors, qu'est-ce qui t'es arrivé ?
- J'ai croisé Fred et Baptiste...
- Et ils t'ont tapé ? Qu'est-ce qu'ils t'ont fait ?
- Ils m'ont choppé contre un mur. Ils voulaient que j'appelle Kévin pour retarder l'heure où on joue...
- Ils voulaient jouer à notre place ? a dit une voix plus grave et amère derrière Solenne.
- Ouais, c'est ça...

C'était Pierrot, le guitariste. Il était avec Dan, le bassiste. Dan est le copain de Solenne. Il a de la chance de l'avoir, mais il la mérite, c'est un type bien. Je considère Pierrot et Dan comme mes frères. Si je devais aller en enfer, ce serait avec ces deux-là.

- Tout va bien, m'a dit Dan en se rapprochant de moi. C'est fini maintenant.
- Allez, viens, on va balancer. Et t'inquiète que ce soir on va déchirer ! Ils vont chier dans leur froc, les gays en rose !


Pierrot avait foutrement raison. Sauf que ce soir là, ça n'allait pas se limiter aux Pink Babies...

Vendredi 14 mars 2008 à 12:25

Où on fait la connaissance d'un nouveau personnage à peine plus dérangé que le premier, quoique dans un tout autre genre.
Où on s'apprête à vivre un concert sans précédent dans l'histoire du rock en France (rien que ça !), et où des pièces se montrent encore un ptit peu plus.
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Accrochez-vous à votre siège, parce que ça va chier des bulles.

Enfin, c'est ce que j'espère.

On était tous dans la loge du Kraka. Pour déconner, Pierrot et Dan avaient collé un autocollant Crave sur la porte de la loge, comme si on était déjà super connus. Ca faisait que quelques mois que le groupe avançait vraiment bien, et on avait une sacrée chance de jouer dans une salle comme ça, devant plus de 200 personnes.

J'étais en train de squatter la basse de Dan tout en déconnant avec Solenne et Kepa, qui nous avait rejoints peu de temps avant. Kepa est un pote de lycée, c'est d'ailleurs là qu'on s'était tous rencontrés, pour la plupart, à part Pierrot, qui est un pote de fac. M'enfin bref.

- Alors, vous jouez quoi ce soir ?
- Bah, on va pas te le dire !
- Vous préférez me laisser la surprise ? Ouais, comme vous voulez...

Solenne s'est mise à rire.

- Moi, je dirai rien ! Vois avec les autres !

Je sais pas comment elle fait, mais elle a jamais le trac avant de monter sur scène. On dirait qu'elle est imperméable à tout ça.
Faut que j'arrête de squatter la basse, Dan va pas être content. Il croit peut-être même que je veux lui piquer sa copine...

Putain.

J'ai posé la basse et je suis sorti de la loge.

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P&P style, and the narrator comes back !
Ouais, enfin je veux juste vous signaler deux trois ptits trucs afin que vous puissiez mieux comprendre l'histoire. Alors regardez un peu par le trou de la serrure avant de suivre Seb.
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- Qu'est-ce qui lui prend ?
- J'en sais trop rien... Il est bizarre, ça lui fait ça desfois...
- Ah bon ? J'avais pas remarqué. Pourtant je le connais depuis deux ou trois ans... Ca m'étonne.
- T'inquiète pas, ça lui arrive pas souvent. Enfin pas trop...

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Ok, j'ai fait mes 35 heures. J'vous laisse les ptits lapins.
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Je suis toujours super nerveux avant un concert. Mais là, ça dépassait le niveau de la fatigue. Solenne était dans l'embrasure de la porte. Elle m'a dévisagé.
J'avais jamais remarqué qu'elle avait les yeux bleus.

Elle s'est approchée de moi et a commencé à me parler.

- Qu'est-ce qui t'arrive, ça va pas ?
- Si, si ça va... mais qu'est-ce que tu fais dans les toilettes des garçons ?
- C'est évident, non ? Je suis venue te parler.

J'hallucinais.

- Je t'écoute...

Mon coeur s'emballait, j'avais les mains moites.
Et envie de partir d'ici.
J'ai demandé la permission à mes jambes, mais elles refusaient de bouger. J'étais figé ici, coincé avec cette fille que je considérais comme ma soeur, comme ma mère presque.

J'ai soutenu son regard magnétique.

[Something's wrong with you...]

- J'ai une proposition à te faire...

Et Merde.

- J't'écoute...

- J'ai envie de toi...

Et pendant qu'elle s'approchait de moi, j'ai senti quelqu'un tirer ma manche en arrière.
Il était là. Et me disait que je m'apprêtais à faire une connerie.

- Une plus grosse que toi.

- Hein ?

Je me suis retourné.
Solenne avait disparu.

- Hé ! Qui c'est qui monopolise la synagogue, là ? Vas-y, dépêche-toi un peu !

Merde.

Les chiottes étaient fermées de l'intérieur. Solenne m'avait laissé ici ?

Ptain, j'suis coincé.
Le coeur battant, j'ai tirturé le verrou dans tous les sens. La clé n'était pas là. J'étais vraiment coincé.

- Hé, Seb, c'est toi ? Tu veux un coup de main ?

C'était Dan, derrière. Merde. Il voulait sûrement me casser la gueule pour ce que j'avais fait avec Solenne.
Mais j'avais rien fait... Non ?

- Attends, laisse-moi faire. Seeeb ? Ca vaaa ?

C'était Solenne.

- CONNASSE DE MEEEEEERDE !!!!!!!

J'ai foutu un énorme coup de pied dans la porte et elle a pété sur ses gonds.

Je me suis retrouvé comme un con. C'est Dan qui s'était mangé la porte.

Il allait sûrement me mettre la misère.

- Aïe... Ca te prend souvent d'insulter les portes ?
- Hein ? Euh non, mais je... c'était pas pour vous... c'était pour la porte...
- Je sais bien que c'est la porte que t'as insultée... Mais comment ça se fait que tu te sois retrouvé coincé ici ? m'a demandé Dan en se relevant et en replaçant grosso-modo la porte sur son ouverture.
- J'en sais rien...

J'ai jeté un regard à Solenne.

- Il s'est passé quoi en fait ? m'a-t-elle demandé.

C'est quoi ce délire ?

- J'en sais rien...
 
Elle a regardé la porte. Le verrou avait été défoncé par mon coup.

- Putain, t'as pas tapé comme un gay, toi...

Et c'est elle qui dit ça...

- Pourtant, tu dis toujours que je suis pas foutu comme un batteur...
- Pleurniche pas ! C'est pour te taquiner !

Elle m'a adressé un grand sourire qui a fait étinceler ses grands yeux verts.

Pierrot est arrivé.

- Aurélien vient d'arriver, et il est en train de bouffer sans nous ! Magnez vous le cul et à table !


Les choses finissent toujours par s'arranger.


Avant d'en sortir c'est une étape à subir...

Et la paëlla du Kraka est vraiment énorme. Surtout que quand y'a plus de riz, on prend des pâtes. Et des pâtes avec Dan, ça donne de la bolonara.
En dessert, on a eu du camembert.
Et du camembert, avec Kéké, ça donne du camembière.


Les choses finissent toujours par s'arranger.
Toujours...


 

Vendredi 14 mars 2008 à 18:34

INTRO
Otherworld
Open Your Eyes
Lose Control
Je suis
Coma
Burn My Tree Part 1
Interlude / Fight Club
Burn My Tree Part 2
When Girls Telephone Boys
Fireal / Fist
Paranoïa Black
Lenne & Paine


- Huuum...
- Yeah.

Solenne et Dan venaient de terminer la setlist de ce soir, et ils étaient en train de me la montrer pendant que Kepa mettait sa caméra à charger, qu'Aurélien passait un coup de fil et que Pierrot allait chercher la Redbull.

- On joue entre une heure et demie et deux heures, ça te va ?
- Ouais, ouais... pas de problème.

J'étais super mal à l'aise. J'avais encore en tête le coup des chiottes. Et une image qui me collait au crâne depuis ce matin.

- Hé, t'es tout rouge, ça va ?
- Ouais, t'inquiète pas, Solenne, j'vais tenir.

Passez-moi un décodeur.

On s'est tous réunis et on a commencé nos rituels : d'abord, un pack de Redbull partagé entre tout le groupe, ensuite un verre de lait pour tout le monde, façon Moloko Vellocet. Ensuite, on se met tous en rond et on s'attrape par les bras, en gueulant tous de toutes nos forces.
J'aime ces moments-là. Je me sens exister.

Ensuite, on est sortis de la loge, et là, c'est toujours le même parcours du combattant : on traverse la cuisine, on monte les escaliers, et on se retrouve derrière le grand rideau noir du Krakatoa. On regarde chacun notre tour l'état du public : combien ils sont, si on voit des potes, et surtout, le cri du public. On peut savoir beaucoup de choses en écoutant le public.

Ouh Yeaah...


J'ai remarqué que Dan murmurait un truc à l'oreille de Solenne.
Une vague de chaleur m'a envahi. Et s'il savait ? S'il savait que j'avais dragué Solenne ? S'il savait que....

Noon. Calme-toi.

Solenne a regardé la basse de Dan d'un air attentif. Arrête la paranoïa, mec, tu lui as rien fait, à sa basse.
Dan avait l'air choqué.
Il s'est approché de moi et m'a tapoté l'épaule avec un sourire.
Solenne s'est approchée de moi et m'a souhaité bon courage. J'ai été capable de murmurer un "merci..." inaudible.
Aurélien s'est approché de moi et m'a regardé fixement en faisant une grimace. "Qu'est-ce qu'il ya ? Tu fais la troooonche ou quoi ?" J'ai eu le courage de rigoler, j'adore quand il fait ça.
Pierrot s'est approché de moi. "T'inquiète pas, tout va bien se passer."
Ouais, on verra bien hein...

Kéké a ouvert le rideau et on est montés sur scène.
Je me suis senti exister. J'ai couru derrière ma batterie et j'ai commencé à la régler frénétiquement.

Pierrot, Solenne et Dan se sont branchés et accordés pendant qu'Aurélien jouait du micro avec le public. Je comprends jamais comment il peut faire rire les gens avec des blagues aussi nulles. Mais moi je les adore.

J'ai compté les quatre premiers temps au charley et on a envoyé Otherworld à l'unisson. Aurélien gueulait comme un possédé, et la foule commençait à prendre vie sous ses mots. Pierrot était hyper concentré alors que Dan et Solenne se taquinaient et se faisaient des clins d'oeil. Je les observais, tous les quatre, entre mes cymbales qui volaient sous mes coups.

Quand je joue, j'ai l'impression que le temps s'arrête. On a passé comme une lettre à la poste sur Open Your Eyes.

Aurélien a remercié le public, qui a répondu par des cris et des hurlements. J'avais un sourire encore plus large que les autres. J'étais vraiment chez moi.

- La prochaine chanson va laisser que des cendres, c'est moi qui vous le dis !

Tout le monde à hurlé de plaisir.

- L'album s'appelle 1977, le groupe s'appelle Ash, et la chanson s'appelle Lose Control !

Pendant que Solenne tapait une petite arpège apparemment improvisée, le public commençait à rire de la blague d'Aurélien. (Ash ça veut dire cendre en anglais, parce qu'on est un peu anglophones)
Une fois les rires tassés, la guitare de Solenne s'est tue, et Aurélien a pris le micro dans sa main. Calmement.

Il la porté à ses lèvres et a hurlé comme un diable. Dan a appuyé en riant sur la pédale de Solenne, qui riait elle aussi, et lança le riff d'intro, que j'ai pas tardé à appuyer en frappant de toutes mes forces. J'avais l'impression de battre au rythme de mon coeur pendant que la basse puissante et incisive de Dan me traversait les côtes pour se loger dans mes tripes. Pierrot a envoyé sa partie de guitare magique, et une fois cette intro magistrale terminée, j'ai pu me reposer sur le riff plus calme du couplet.

J'ai repensé à mon rêve.

J'ai essayé de le sortir de ma tête, mais pas moyen.

"Here comes the night- it is coming on

The lights are low and our records on
Inside your veins and you lead me on
Here comes the night- it is coming "

Pierrot a envoyé le solo, repris en écho par Solenne, alors que je revoyais mon rêve en direct. Je me revoyais me coucher. Je me revoyais avec une inconnue dans mon lit. Je revoyais la porte se fermer. Je revoyais le déchet lépreux en forme d'étron pendre de mon entrejambe.

Et j'ai hurlé en plein milieu du solo.
Tout le monde a applaudit en criant, Pierrot et Solenne ont terminé leur solo dans un énorme délire psychédélique à la wha-wha, souligné par les lignes sans faille que Dan traçait depuis le début du morceau.
Pendant le final, des frissons me parcouraient le dos, je prenais tellement de plaisir à battre que je pouvais plus m'arrêter.
Tout le monde a arrêté de jouer, sauf moi. La chanson s'appelle pas Lose Control pour rien. Je me sentais possédé, mais tellement bien...

Une fois mon solo de batterie terminé, je me sentais mieux.

Je me sens mal vous faire tout un compte rendu du reste, mais apparemment nos compos ont plutôt bien marché.

C'est après que ça s'est gâté. Les Pink Babies sont montés sur scène alors qu'on ne l'avait pas encore quittée. Ils nous ont insultés devant le public. Certains nous ont même rejoints pour nous aider à les dégager.
Ca s'est terminé en baston générale. J'ai attrapé un pied de cymbales pour l'envoyer dans la gueule de cette bande de rockers bien pensants. Fred et Baptiste ont été les premiers à en faire les frais. Aurélien a démonté son spear et a commencé à se défendre avec. Il a balancé deux mecs dans la fosse comme ça. Dan a rapidement dégagé sa basse, puis l'a assez longuement regardée avant de la prendre par le manche. Il l'a levée bien haut en l'air et l'a abattu sur la gueule d'Alex, le bassiste des Pink Babies. J'ai cru voir une inscription sur le dos de l'instrument.
La bagarre a duré assez longtemps pour que la Sécu et les ingés-son s'en mêlent.

Mais quelqu'un ne semblait ailleurs.
Imperméable au bordel ambiant, Solenne s'approchait de plus en plus de moi.
Elle a pris mon visage dans ses mains. Elles n'étaient ni chaudes, ni froides. Je me sentais bizarre.
Un vigile est tombé à côté de moi. Peut-être qu'il voulait que je lui pique son flingue...
C'est ce que j'ai fait. J'avais l'impression d'être dans un autre monde, comme une sorte de monde parallèle, où les gens étaient flous et lointains. Mais elle, elle était là. Nette... et si réelle.

Si réelle...

J'ai ramassé le flingue. Les gens autour étaient tellement irréels que je les voyais bouger au ralenti. Je voyais des ondes s'échapper de chacun d'entre eux. Plus aucun bruit de lutte, plus de cris, plus rien. Plus que le silence.
Je suis descendu de scène, la fille m'a suivi. Elle m'a montré une porte, qui menait à un passage sous la scène. J'avais ni chaud, ni froid. J'étais bien.

Je suis arrivé finalement dans les loges, en passant par une porte habituellement dissimulée par des posters.
Les murs n'avaient plus la même couleur qu'avant. Ils avaient une transparence fantomatique.

La fille qui ressemble à Solenne m'a amené aux toilettes.

Enfin. En fait de toilettes, c'est plutôt devant un trou béant qu'elle m'a amené

Tout était aussi léger que grave. (Si, si, je vous jure que c'est possible.)


- Entre. Il t'attend.

C'est un rêve... J'ai sauté dans le trou en pensant que je finirais bien par me réveiller.

Je suis aussitôt arrivé dans une étrange salle rouge. Un fauteuil noir était posé au milieu de cette salle grande et vide, sans entrée ni sortie.
Je savais même pas d'où je venais.

C'est un rêve...

Je me suis approché du fauteuil.

Il s'est retourné.


Vendredi 14 mars 2008 à 23:00

Où on fait la connaissance d'un troisième personnage à peine cinéphile, assiste à la fin du concert de Crave, et retrouve des clins d'oeils à s'en arracher les yeux.
Où le côté mindfuck s'installe un peu plus, où rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme, évolue, se déforme, parfois. C'est humain.
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J'avais éteint la caméra dès les dernières notes de Lenne & Paine.
Et j'avais bien fait. Le groupe censé jouer après Crave est monté à peine le concert terminé et ont commencé à les agresser.
Pendant que je rangeais en vitesse la caméra dans son sac et que je repliais le pied pour le ranger aussi, un gros type est tombé de la scène juste à côté de moi.

Dan et les autres étaient encore sur la scène, à se battre contre l'autre groupe, une partie du public et des malabars du service de sécurité du Krakatoa.

J'ai enjambé une barrière tombée par terre pour traverser la fosse et sortir au plus vite. Je sais pas ce que j'aurais fait si j'avais eu un quelconque pépin avec la caméra. Elle n'est pas à moi, et Lola me casserait la gueule si je lui rendais en pièces détachées...

Je marchais aussi vite que possible en évitant les mecs qui se bastonnaient dans le public quand j'ai remarqué un truc vraiment inhabituel.

Un type était planté là, les yeux dans le vague. Il ne bougeait pas. Je l'ai regardé, et il a disparu pour réapparaître un peu plus loin.

Mon coeur s'est mis à battre plus fort.

- Hé, monsieur !

J'ai entendu une petite voix. Mais pas une petite voix de gamin qui a perdu sa mère au supermarché.

- Ca commence.

Un petit gamin Noir me regardait avec des yeux brillants. Il m'a montré le type qui disparaissait avant de réapparaître.

- Lui ?

Le môme a hoché la tête.

Mon coeur me faisait mal.

J'ai serré les sangles de mon sac, et je me suis approché du mec bizarre. Qui est ce type ? Je me suis approché de lui et j'ai essayé de le reconnaître avant qu'il disparaisse. Il était assez grand et carré, avec un visage doux au regard bleu et vide, encadré par de longs cheveux bruns et un bouc assez court. Il avait un long T-shirt "Kill 'Em All" et un grand pantalon large. Il était revenu en contrebas de la scène. Il la fixait comme s'il y avait quelque chose de particulier a cet endroit-là.

J'ai suivi son regard : il y avait Pierrot, le guitariste qui porte le même prénom que moi, Solenne, l'autre guitariste, Dan le bassiste, Aurélien, le chanteur et...
Il manquait quelqu'un.

Le batteur ! C'était Sébastien que je suivais depuis tout à l'heure ? C'est fou, je l'avais même pas reconnu...

- Sébastien ? Hé, Sébastien ! Tu m'entends ?

Il ne réagissait même pas. Comme s'il était ailleurs, complètement absorbé par la scène qu'il fixait tout en se déplaçant.

Il a disparu une dernière fois. Il est allé sous la scène ?

- Hé, Dannie !! Sébastien s'est barré !

Il m'entend pas, le bougre...

- HE ! DAN, MERDE ! SEBASTIEN A DISPARU !

Mon coeur me faisait mal à battre si fort.

- Bordel de merde... ai-je balancé entre mes dents.

Si Sébastien est sous la scène, il doit bien sortir à un moment quelque part...

J'ai couru nerveusement dans la fosse. Y'a pas 36000 sorties, à la fin... J'ai pris machinalement mon portable pour regarder l'heure. Ma main a rencontré un bout de papier. C'était écrit :

Les Impertinents Du Spectacle présentent L'ENVERS DU DECOR.

J'ai compris un truc et me suis précipité vers l'arrière-scène, alors que tout le monde se battait autour de moi. Je serrais mon sac contre moi en espérant que la caméra n'ait rien. Les mecs de la sécu étaient trop occupés à dissiper la baston pour faire attention à moi.
J'ai descendu les marches à la volée et ouvert la porte qui donnait sur la cuisine.

Elle était vide.

Le bruit de la baston s'est fait plus discret à mesure que je marchais dans la cuisine. J'avais moins mal à la tête. Je me suis dirigé vers les loges, mais à peine avais-je eu le temps d'atteindre la porte que j'ai remarqué un truc bizarre.


La porte des toilettes était explosée contre le mur, et juste à côté, il y avait une porte rouge que j'avais jamais vue. Un nain avec une veste, un pantalon et un chapeau rouges me regardait en souriant largement, les yeux brillants.

- That's the way in, my friend !!

Il parlait en roulant les "r", comme un italien. J'avais vraiment peur. Plus de ce qui m'arrivait que du nain en rouge, en fait.

- Est-ce que j'ai vraiment le choix ?

- On a toujours le choix, my friend !

Il m'a fait un clin d'oeil.

- Pourquoi vous me dites ça ? Et il est où, Sébastien ? Vous auriez pas vu quelqu'un passer ?

- Occupe-toi de ton destin, petit homme... Tu t'occuperas de celui des autres en temps utile.

Il me parlait toujours avec un large sourire.

- "petit homme" ?
- Le fait que tu mesure 1 m 97 et moi 1m20 n'entre pour rien dans mon jugement, Pierre.

Là, j'avais franchement peur.

- On y est.

Il m'a désigné une porte.

- Regarde. C'est par là. C'est ici que tout commence.

Ca ne sert à rien de réfléchir. Mais peut-être qu'en poussant cette porte, je retrouverai Sébastien et qu'il m'expliquera ce qui s'est passé, que c'est une mauvaise blague, et que tout redeviendra comme avant. Peut-être aussi que j'aurai le moyen d'expliquer ce qui s'est passé ce soir-là.

- Allez ! Ne reste pas planté là ! m'a dit le nain d'une voix douce et enjouée.

Je dois avouer qu'aussi bizarre que ce nain me paraisse, il n'avait pas l'air méchant. Je me suis cru dans un film de David Lynch.

J'ai écouté son conseil et j'ai ouvert la porte. Il m'a fait un signe de la main et quand j'ai fermé la porte, je me suis retrouvé dans un drôle de bar.

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