Mardi 27 mars 2012 à 23:49

 

- Finalement ça te va pas si mal, le rôle de leader. Fais pas n'importe quoi, c'est tout ce que je te demande, a dit la fille à la voix un peu sèche. Et toi, tu viens avec nous, a-t-elle ajouté à l'attention du bellâtre au sabre assis à côté d'elle.

- Woh, Sonia ! Tu me surprends, là !

- Ta gueule et debout, Neto. C'est pas le moment de déconner, on sait pas ce qui nous attend.

- Ben justement ! C'est en sachant rire du pire qu'on peut y faire face.

Il a peut-être pas tort. Mais à mes yeux il reste qu'un psalmodieur de jolis mots pour jolies filles.

- N'importe quoi. T'as toujours été un lâche qui voulait se donner l'air cool. Mais au final, t'es qu'un crétin comme les autres. 

Qu'est-ce que je disais ? Je me suis tournée vers Kepa et lui ai sorti une phrase comme il aime.

- Allez, chéri, bouge tes jolies fesses et viens avec nous, on a un monde à sauver.

- Je réfléchis.

- Ouais hé ben c'est pas le moment, a claqué Neto. Y'a ton pote qui nous attend en haut. Seb, tu viens ?

- Ouais, a lâché le beau gosse ténébreux de peu de mots. Je vois pas quoi faire d'autre de toute façon.

- Lola ?

- Oui mon nounours ? Tu te mets à douter, comme ton ami ? Tu veux l'épouser et tu sais pas comment lui dire ? Pauvre chou, tu veux en parler ? 

Il a complètement ignoré ma super tirade (quoi, elle est pas géniale ?)

- Tu penses qu'il est possible qu'on soit morts ?

Le démon rayé qui apparemment s'appelle Soda a répondu à ma place, me laissant les lèvres ouvertes à gober le vide.

- Ne laisse pas une hypothèse prendre le pas sur toutes les autres sans avoir de bonnes raison de le faire.

- C'est ça. Voilà. Allez on y va. Attrape ton prolongement masculin et ramène ton boule.

- Mouais.

C'est un Kepa perplexe qui attrapa son énorme attribut sus-mentionné et rejoint Dan en haut des escaliers. Le temps qu'il se décide, Neto, Sonia et Sebastien y étaient déjà. L'espace d'une seconde, j'ai cru qu'il y avait un orage dans le bar. J'ai tourné vivement la tête pour m'aperçevoir que c'était seulement Solenne qui avait rejoint les autres à sa manière. Comment elle se la pète... ça lui réussit pas, la fin du monde.
Ca m'a énervée, du coup jsuis montée en traînant les pieds. Soda observait toujours, affalé sur sa chaise en bois. Il a fini par prendre la parole alors qu'on commençait un peu tous à transpirer des mains.

- Une fois la porte ouverte, vous n'aurez plus de repères. Vous serez dans une strate qui pourra correspondre à n'importe quoi. Passé, présent, futur, réalités alternatives, émotions et sentiments enfouis au plus profond de vous-mêmes... Je peux pas vous dire ce qui vous sera attribué. Vous ne serez peut-être même plus tous ensemble. Gardez à l'esprit que si c'est le cas, vous finirez tous par vous retrouver.

- Autre chose ? a demandé Kepa dont la mine se grisait à vue d'oeil.

- Croyez.



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J'ai ouvert la porte et une énorme spirale prismatique nous a tous aspirés. Du coin de l'oeil je vois Seb déployer ses ailes. C'est magnifique. Je tourne la tête alors qu'il me dépasse et commence à tracer de longues courbes, laissant des trainées multicolores derrière lui.

Génial et flippant, mais génial. Mais flippant. Tout dépend du point de vue. J'essaie de déclencher le feu pour faire la course avec lui, mais ça veut pas marcher. Je me crispe à m'en vriller le bide comme un soir alcoolisé, mais Solenne me devance, chevauchant ses propres éclairs. J'éclate de rire, et comme s'il n'avait toujours suffi que de ça, je brûle, mon amour à 4 cordes dans la main et rattrape les deux autres avec un sourire victorieux indélébile.

On s'élance, Solenne et moi, dans tous les sens, jouant de disparitions intermittentes pour gagner un peu de distance. 

Seb bat des ailes de plus en plus fort et on a du mal à test. Mais on tient le coup. 
Suite à une vrille, je capte brièvement les silhouettes des autres. Neto est devant, les filles et Kepa un peu derrière lui. Sonia est assise en tailleur, et Lola, j'arrive pas trop à la distinguer.

D'un seul coup, la spirale se courbe, se compresse, se détend et se ramasse sur elle-même. Je verrai plus jamais ma multi-effets comme avant.

Tout devient noir, puis blanc, puis noir. Mais pas le même que le premier. Y'a de la nuance. De plus en plus, en fait. Ca éclate, partout autour. S'impose. Il n'y a plus que ça. Les choses ont changé, littéralement. Un grand flash blanc. Je ressens ça dans mes tripes. 
Mes pieds rencontrent une surface dure et sans aspérités. Humide. L'air est chaud, agréable. Le monde commence à prendre forme et j'assiste émerveillé à la transition. On dirait bien que j'ai définitivement retrouvé mes émotions. 

- Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ?

Sonia. Sa voix me sort doucement de ma torpeur. Les autres sont là, aussi. 

- On explore. On va bien finir par trouver pourquoi on est ici.

Solenne sort son téléphone. 

- Je crois que le temps est arrêté. 

- Sauf le respect que je dois à la lumière qu'est ta copine, je crois qu'elle débloque un peu, là, m'a dit Neto.

- Elle sait ce qu'elle fait, même si ça nous échappe. 

J'ai rien trouvé de mieux à dire, et j'ai compensé en le sortant d'un ton amer. Ca devrait plutôt être à elle de nous guider.

- Y'a des ruines, là-bas. On devrait aller voir, dis-je.

Personne n'a contesté, certains ont fait un semblant de hochement de tête. Aucun n'a fait remarquer qu'on ressemblait à des enfants aventurés dans un coin perdu et inconnu, en train de jouer à mener une enquête pour savoir ce qui s'était passé ici.

La lande épaisse qui nous entoure est pas super rassurante, malgré l'éclat blafard de la lune qui guide notre chemin.

Il fait de plus en plus sombre à mesure qu'on avance. Je me mets à brûler, en laissant des flammèches dans mes traces de pas.

On croise une cabine téléphonique orange et grise complètement vide alors qu'on marche depuis ce qui devrait ressembler à une demie-heure.

Pas de papiers sous vitre contentant les instructions d'urgence ni les numéros à appeler. Pas d'inscription trashy sur le mur ou les vitres. Le combiné n'a pas de tonalité. Kepa appuie sur les chiffres mais le téléphone parle pas davantage.

Un peu déroutés, on s'est remis à marcher. Je sens un mal qui rôde. Seb a les dents serrées et l'oeil alerte depuis un moment, lui aussi.
On s'enfonce dans une forêt. Il prend le relais pour ce qui est de la lumière. Des hululements se font entendre entre deux craquements d'arbres. Une sensation pesante s'abat. Comme si cette forêt voulait nous avaler. 
"Peut toujours essayer..." grogne une voix dans ma tête.

Je sors mon paquet de clopes de ma veste et m'en allume une, comme si ça pouvait me faire du bien. Neto et Sonia m'ont suivi. J'en ai payé une à Kepa. Solenne ne disait rien.

Le malaise s'écarte un peu de mes tripes mais pas de ma tête. 

On continue à marcher. 
Le ciel se noircit, un peu. Un peu. Le vent secoue les feuilles des arbres. Elles nous tombent dessus, tout doucement, en décrivant une forme régulière et dansante. 
Vivantes, conscientes. 

Mais rien ne se passe. On avance, encore et encore, jusqu'à ce que l'étrange sculpture naturelle animée soit hors de vue. 

On a quitté la forêt pour les cent derniers mètres de lande qui nous séparaient des ruines. On dirait celles d'un château.







Vendredi 1er juin 2012 à 1:10




Des accords de basse ont déchiré l'atmosphère. Deux par deux. De plus en plus forts et rapides. Nerveux. Assourdissants. Rythmique guitare / batterie imparable s'est posée dessus, consistante avec notre entrée.

Un hurlement encore plus grave que la basse a fait trembler ce qui restait de murs. J'ai allumé la mienne au cas où. Solenne a regardé son portable. 

- Le temps s'écoule 4 fois moins vite ici.

- Ca va, il va pas nous attendre trop longtemps, Soda, sourit Kepa.

- Ouais ben c'est pas une raison pour traîner ici. Je sais pas ce qu'on fout là, mais je le sens pas, lâcha Neto, la main crispée sur son sabre.

- Personne se demande de quoi peut bien sortir un cri pareil ? demanda Sonia, qui commençait à perdre patience.

- Je crois surtout qu'il y en a pas un qui a les couilles de partir vérifier, lui répondit Lola avec un sourire sarcastique.


Un bruit d'éboulement se rapproche de nous. Réagir, vite.


- Pas besoin, souffla Neto. Courez, ça suffira.

- T'es fou ? On a pas fait péter le budget effets spéciaux pour rien ! 

Ignorant mon argument, Neto a détalé. Je lui aurais bien enflammé le crâne.

Ouh putain.

Je veux pas me la jouer blasé, mais depuis qu'on est ici, on en a vu. Mais apparemment pas tout.

Une créature de chair sanguinolente et musculeuse sort des décombres du mur qu'il vient de pulvériser. Ses petits yeux scrutent dans ma direction. Je soutiens son regard en priant pour pas me pisser dessus. Pourquoi il a fallu que je récupère mes émotions maintenant ? Le peu qui était revenu dans le "réel" était déjà pas évident à gérer, mais là...

- Courez, dis-je de la voix la plus calme que j'avais en stock.

- Ouais. Courez, a asserté Kep. On vous couvre.

J'ai été surpris. Agréablement, aussi.

Le streum faisait bien six-sept mètres de haut, sur quatre de large. Peau grise et décharnée, à vif par endroits. Quelques gouttes de son sang viennent abreuver les décombres qui l'ont fait couler.

Il a pas l'air très content. Comme pour me confirmer cette idée, il a rugi une fois de plus et son souffle putride nous a poussés en arrière, glissant sur la terre meuble.

Et là c'est le moment où tu regrettes amèrement d'avoir voulu jouer les héros. Je sais pas pour lui, mais moi, j'ai les tripes qui dansent et le bide en bordel. Lenne se fait lourde. Et merde, manquait plus que ça.

Kepa travaille la bête au corps façon taureau par les cornes et moi je suis incapable de brûler. Pas faute d'essayer. Putain de boulet. 
Il s'est pris une baffe qui l'a fait voler dans la lande environnante. Gargantua me charge. C'est la fin. C'est la fin et je serai resté en retrait jusqu'au bout. Prier pour que Kep soit encore en vie. Arrive pas à m'énerver, ni à brûler. Je sers vraiment à rien. Au moins les autres ont pu partir.

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Putain Dan reste pas là les bras ballants avec ta basse trop lourde, tu me fais pitié.

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Le sacrifice sera pas vain.


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Putain mais t'as fini ouais ? Bats-toi ! 

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Je pense à Solenne. A Aurélien et Pierrot qu'on a pas pu retrouver. Je souhaite à Neto d'obtenir ce qu'il était à l'origine venu chercher. 

La créature de Frankenstein me percute. Je serre Lenne à deux mains de toutes mes forces, comme pour la protéger, avant, pendant et après le vol. A mon tour d'être dans la lande. Je vois pas Kepa et j'ai mal à tout le corps.
 Pas possible de me lever. En même temps je peux pas y voir grand chose d'où je suis. Merde, je vais quand même pas me laisser tuer sans porter un coup. Ca se fait pas, ça. 
Je commence à m'aigrir. Une flamme taquine le bout de mon doigt. Last cig before death ? Don't bet on it.

Je me suis redressé en hurlant de tous mes os craqués en même temps. Tremblant, j'attrape mon paquet de cigarettes et m'en cale une entre les lèvres avant de retomber lourdement sur le dos. J'ai mal, bordel. 

Essaie de me détendre et de me calmer, de profiter au possible de chaque bouffée pour me dégager de la douleur, l'éloigner au maximum.


RAAAAAH. Putain !!


Je balance ma clope dans l'herbe, excédé. Me relève à nouveau, les os qui re-craquent de toutes parts, mon cerveau me crie que je suis pas en meilleur état qu'un meuble Ikéa avant assemblage et que je vais plus trop tarder à finir au rayon pièces détachées de l'usine à rêves.

Fuck me to death. Les yeux sans doutes embrouillés par la douleur, je crois voir Pierrot me faire un thumb up. Transpirant, chaque muscle de mon corps tendu et les nerfs chauffés à blanc, je me relève, complètement cette fois. Le feu prend le relais. Sauvé.

Ma tête continue de tourner, mes os se replacent, les blessures se referment, même mes fringues retrouvent leur apparence d'origine. Va savoir pourquoi.

Je prends Lenne dans mes bras et la serre fort, reconnaissant et les yeux embués de larmes, en regardant la direction où j'ai vu Pierrot quelques secondes auparavant.

Ca fait tout drôle de retrouver tout ça. Je prends la colonne de feu direct pour le musée des horreurs, et je participe à la fête.

- Où t'étais passé ? me crie Kepa gladiateur face à l'absurde abberation scénaristique qui se trouve devant lui et s'avère pas avare en baffes non plus.

- En pause clope. On a dû se croiser.


C'était pas ma voix qui venait de parler. Trop sombre, presque caverneux, en tous cas trop rocailleux pour être moi. Ca venait de moi, mais c'était pas moi. Enfin, je crois.


- T'as rien ?

Boum. Gros taquet pour Flesh Godzilla.

- Non...'t toi ?

- Ca ira.

On frappe synchro. Il fait couler le sang, je le cautérise. La bête hurle. A deux c'est mieux. 
Je joue au sculpteur de flammes. Avec Kepa on repousse les limites du stylé, et une infime partie de moi, bien au fond, n'en revient pas. Alors qu'on atteignait un nouveau palier de fun, deux types sont arrivés en courant, flippés et à bout de souffle.

- Baptiste ! 

- Enfin ! haleta l'autre, plié en deux, les amins sur les genoux.

- C'est quoi ce délire ? s'est énervé Kepa.

Encore brûlant, j'ai reposé ma basse.

- On en sait rien ! Et puis vous êtes qui, vous ?

J'ai compris, mais mes lèvres restent désespérément fermées. Le feu retourne progressivement dans mon coeur.

- On était à un concert, a dit Kepa. Il s'est passé beaucoup de choses pas explicables, mais on a fini par atterrir ici après avoir ouvert une porte à l'étage d'un bar.

- Vous aussi ? a dit Fred.

- Pink Babies, ai-je fini par lâcher.

- Tu nous connais ?

- Bien sûr abruti. Je suis dans le groupe que vous avez agressé. On sait toujours pas pourquoi.

Comme pour nous maintenir dans l'ignorance, c'est le moment qu'a choisi le streumon pour nous sauter dessus dans un spasme nerveux, après avoir gentiment dégagé ses potes qui le tenaient par les bras. Sympa pour eux.

Cette fois on a détalé comme des lapins. Kepa devait lui aussi sentir les effets de la fatigue et le besoin viscéral d'un mode d'emploi des réalités alternatives. Il me dépasse, je me sers des colonnes de feu pour réapparaître ça et là et garder un minimum de distance avec le géant de chair à la culture musicale douteuse, mais bien vite, je me rends compte que ça sert pas à grand-chose. Mes forces commencent à m'abandonner alors qu'ons 'approche d'une espèce de crypte. J'y vois pas grand chose, il fait trop noir, mais pas question de ralentir, ni d'utiliser le feu. Je bute donc contre deux murets, dix blocs de béton et cent cailloux. Pain's back. Génial. Kepa prend à droite au-dessus de la crypte et je plonge à l'intérieur. Je cours sur les tombeaux, le gros freak pas sexy toujours sur mes talons. Je crois qu'il m'en veut d'avoir pensé ça. 

Mon bras me fait mal, Lenne devient beaucoup trop lourde et si je la tiens à deux mains je peux plus courir. Je retire tout ce que j'ai dit sur le budget effets spéciaux. On a rien à voir avec des superhéros.

J'ouvre une porte d'un coup de basse libérateur, poumons et spleen brûlants, et dans un dernier sursaut de force, saute par-dessus un muret pour me cacher derrière. Je retiens ce qu'il me reste de respiration. A peine le temps de compter cinq battements de mon diaphragme qu'un impact explose le mur voisin. Je me prends des éclats de terre plein la tête, les cheveux, le visage. J'entends la créature s'éloigner d'un pas lourd. Mon crâne bascule contre la paroi dans un soupir soulagé.

La Peur, Dan. Dan, la Peur. Vous vous connaissiez autrefois, mais vous vous étiez perdus de vue.



 

 





Dimanche 17 juin 2012 à 1:17

Retour des paratextes dans une période où tout va mal. Criez pas trop fort, je savais que ça vous avait manqué. Ceux qui ont pas decelé l'ironie dans la phrase précédente, vous sortez. Autant être honnête, je suis face à des difficultés qui me lassent d'une force suffisante à fermer le livre et raccrocher les jacks, et qui portent sur des choses que mon entendement ne me permet pas d'habiller avec des mots. Je tiens donc à remercier ceux qui me soutiennent dans ces heures difficiles et qui, rien que par leur façon d'être, me donnent envie de reconsidérer ce choix pour lequel je me suis laissé 1000 jours. 1000 jours pour décider ce que je vais faire de mon chemin. Ecrire ce chapitre m'a fait pas mal de bien, et je m'y attendais pas. C'est toujours bien d'être surpis, ça donne une raison de se mettre en sursis. Ca arrangera pas mes problèmes, mais ce soir, je me sens un peu mieux, et c'est en partie grâce à vous. Pour la plupart, vous vous reconnaîtrez dans ce chapitre. C'est pas volontaire, vu qu'il a été écrit y'a... pfwah, un an, je crois, et que même si j'ai rajouté de la matière, la plupart des références étaient déjà présentes dans la version d'origine. 

Autant vous prévenir, ce chapitre risque d'être aussi moyen que ce paratexte pue la mort et la tristesse incomprise d'un emo de 12 ans, par conséquent vous êtes toutes et tous invités à venir le critiquer, comme tous les autres chapitres d'ailleurs, ce que personne ne fait, mais bon, je le dis quand même, exprimez-vous bordel ! Ne laissez pas votre quotidien étouffer votre esprit critique entre deux tranches de facebook ou de pubs à la télé. Ne laissez pas votre mental dépérir comme un alcoolique vide ses bières - sans conviction. Criez, hurlez, riez, montrez que vous vivez. Vibrez, bordel. Un jour, vous en serez peut-être incapables. 






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Une veste marquée "Faith", une basse qui s'appelle Lenne, un zippo plus ou moins incontrôlable entre mes poumons, des émotions à moité de retour, une propension nouvelle à me foutre dans les situations les plus invraisemblables, un paquet de clopes déjà assez sérieusement entamé, des doigts-briquets, moi.

Et des trucs dans mes poches. Bordel, j'avais oublié ça. Je sors une des fioles en me défiant de pas me demander comment ça se fait qu'aucune ne soit abîmée, ni comment elles peuvent autant te remettre d'aplomb malgré leur si petite contenance. Et surtout pas pourquoi j'ai pas pensé à en boire un coup plus tôt. Surtout pas.

J'en avale une d'un trait et me sens revivre. Le feu se déchaîne dans mon corps tout entier. Je crie, j'hurle, j'exulte. Jamais il a été aussi fort, aussi agréable, aussi uni. Je découvre un nouveau niveau de bien-être.

Je soulève Lenne et nous éclaire jusqu'à la sortie.

La lumière au bout du tunnel. Mythique, magnifique, magnétique.
A mesure que je me rapproche, elle bouge. J'essuie mes lunettes et continue d'avancer entre les murs humides qui fument doucement sur mon passage. Mon regard émerveillé se durcit quand je sens mes forces disparaitre aussi vite qu'elles étaient revenues. Je titube, laisse à moitié tomber ma basse par terre, la fais traîner par terre, me rattrape aux murs glissants. Ma tête bourdonne, mes oreilles sifflent. Je lâche un râle et me cale une clope entre les dents. J'ai l'impression que la flamme qui me sert à l'allumer est mon dernier souffle transformé.
J'arrive pourtant à tirer dessus, péniblement. J'ai des douleurs dans à peu près tout le corps, je râle doucement à chaque expiration.

Les ondes de lumière se dirigent finalement vers moi. Doucement, lentement. 

Tranquillement elles m'absorbent et m'enveloppent. Subitement enchanté, je me retrouve transporté dans un néant brillant. Une voix.

"L'homme qui voulait choisir ouvrit la porte. Alors qu'il la contemple, l'esprit déterminé, le doute s'installe vaguement en lui. Il s'avance, en refusant de s'humilier."

"Et il reste pédant, ayant la volonté sans être conscient qu'il n'a pas la raison d'être de toutes ces choses, ni même la connaissance. Il passe le seuil."

J'existe encore ?


Explosion de lumière. Du blanc, du bleu, des ondes. Par milliers. Des gouttes d'énergie aussi. Ce plongeon était mortel, de quoi faire passer les grands 8 pour des trains électriques. La lumière me fait tournoyer dans tous les sens. Des éclats de feu s'échappent de moi alors qu'elle me propulse et me plaque.

Dans un lit.

Une voix reconnaissable entre mille m'hurle aux tympans entre deux gémissements. Je suis complètement nu et je crève de chaud. On transpire. Elle me regarde amoureusement de ses beaux yeux verts mi-clos. 

- On en est au quantième ? je m'entends dire en voix off, comme si le monteur avait cru bon de me rappeller ma dernière réplique, mais s'était un peu planté niveau synchro.

- J'ai arrêté de compter au cinquième, doudou, me glisse-t-elle dans un souffle, juste avant de se remettre à me grandir l'ego sous fond de joyeuse destruction auditive. Sa voix, comme son visage et son corps, me semblent plus que jamais au-delà de toute perfection. Mais "doudou", sérieusement ?

C'est le moment qu'a choisi mon cerveau pour se remettre à fonctionner. Si je viens pas de mourir, peut-être que j'étais mort avant, au moment de la fin du monde, et que tout ce que j'ai vécu n'est qu'une succession d'expériences liée à l'après-vie. Peut-être même que c'est ça, l'enfer, revivre encore et encore des moments heureux entre deux passages dans des salles de tortures remplies de monstruosités et de successions d'évènements incompréhensible. Solenne continue de crier, mais j'arrive pas à me concentrer pour autant. Mon corps et mon esprit semblent dissociés. Ou alors je suis mort mais une force inconnue m'a fait remonter le temps assez loin pour me donner une deuxième chance. Me dis pas que ça va être à moi d'éviter la fin du monde, je le vois venir à des kilomètres et c'est hors de question. Je suis qu'un môme, bourré de questions qui me tordent l'esprit dans tous les sens, mais un môme quand même.


- T'as encore battu ton record, mon chéri. Faut arroser ça.

Quand je dis que je sors avec la fille parfaite. Sonia me sermonnait toujours là-dessus, sur le culte de la performance, en râlant sur mon manque d'humilité quand je lui racontais mes soirées spaghetti / ciné / restau / sexe. Elle disait que c'était pas sain d'avoir quelqu'un qui te rappelle régulièrement que tu règnes au pieu et que t'es le maître du monde sous les draps. Que si ça t'empêche pas de t'améliorer, ça favorise pas non plus les remises en cause. Et toujours le même regard qu'elle me lançait quand je lui disais que je me déteste suffisament, voire trop, pour risquer ce qu'elle me prédisait. Et effectivement, il avait fallu aller jusqu'aux super-pouvoirs pour que je me croie au-dessus de tout. 

Pour l'heure, c'était au-dessus de Solenne que j'étais, nimbé du plaisir partagé, grognant de bonheur, des spasmes parcourant mon corps tout entier. Au sommet de sa poitrine pulpeuse, ses tétons dardaient vers le ciel jusqu'au fond de mes yeux enivrés de désir. 
Mon cerveau s'était tu.  

Qu'est-ce que c'est bon d'être en vie.

Un flash noir obscurcit ma vision. Je pars loin, très loin. Je me sens presque prêt à quitter mon corps. Quand je rouvre les yeux, je me retrouve à genoux, la tête de Solenne au-dessus de mon nombril avec une main derrière les oreilles pour retenir ses cheveux, comme en transe dans un va-et-vient incessant de haut en bas. Je m'abandonne au plaisir acméen qui m'amène dans un équilibre étrange entre le ciel et la terre.

Et là c'est moi qui hurle, abandonné aux talents de cette ange qui partage ma vie et l'illumine un peu plus chaque jour.

Elle s'allonge doucement et je m'effondre à ses côtés. 


- Tu es à ma vie ce qu'Amanda Woodward est à Melrose Place, finis-je par lâcher dans un souffle rauque, la gorge et la bouche asséchées par ce que Sonia appelle sobrement la "compétition vaginale".

- Hey, c'est pas cool, ça !

Elle me met une bourrade dans l'épaule et on se marre comme des gosses. 


- C'est un groupe génial, je te ferai écouter.

- C'est ça, rattrape-toi !

- Mais j'te jure, c'est pas des blagues !

- Mouais...

- Tu verras. Alors, c'était comment ?

- Rooh... tu recommences ! J'te le montre pas assez ou quoi ?

- Je sais, j'suis lourd avec ça...

- Pas qu'avec ça, j'te rassure !



Elle rit. J'ai mal. Nous sommes heureux. 

Nous sommes heureux et j'en paie le prix, sans savoir qu'elle casque beaucoup plus que moi, chaque fois qu'on se voit représentant pour elle une occasion de se mettre à découvert, même involontairement.

J'essaie de m'empêcher de repenser à tout ce qui s'est passé avant que je me retrouve en elle. C'est la deuxième fois que je me retrouve dans le passé. Ca doit peut-être se reproduire encore. Ca collerait avec l'idée que je suis mort, que ce soit depuis le début ou tout récemment.


- Dan, j'avais encore jamais joui comme ça, a-t-elle fini par dire.

Ha ben ça fait plaisir ça, tiens. Pensées coupées. Je respire.

- D'où le...
 ?

Je pointe mon index vers mon entrejambe sous les couvertures.

- En partie.

- Mais quelle salope.

- Hey !

Morte de rire, elle me jette un oreiller sur la tronche et m'attrape la queue avant que j'aie pu faire quoi que ce soit d'autre qu'afficher un sourire probablement très niais sur mes lèvres anhydres.

- Alors, qu'est-ce que t'as à dire, maintenant, hein ?

Elle rit toujours. C'est communicatif.

- Je boufferais bien un pot de Nivéa.

Elle me fout une petite baffe sur le bout du gland.

- Ouga !

- Désolée ! J'voulais pas te faire mal...

- C'est pas grave, répondis-je un peu crispé.

Elle me donne un long baiser et part chercher la bouteille d'eau et les clopes. Solenne ne fume qu'au lit, et après l'amour. Ou avant, mais rarement. C'est le moment de rassembler des données.

- Tu sais que c'est celle-là la plus dangereuse ? Elle va directement dans le sang.

- Je m'en fous, c'est ma seule. Pas comme certains !

Bon. Tentative d'obtenir de quoi y voir plus clair sans paraître bizarre.


- J'ai quand même vachement réduit depuis qu'on est ensemble. Ca fait combien de temps, déjà ?

J'aurais peut-être dû la jouer deuxième degré.

- Tu déconnes ?

Merde.

- Tu devrais le savoir, reprit-elle, le regard légèrement assombri. Pourquoi tu me demandes ?

Et là, j'suis censé faire quoi ? Lui dire la vérité ? Non mon grand.

- Je sais pas, comme ça... Je suis pas très dates. [Prier pour que ça passe] Ca doit faire au moins 8 mois, je dirais...

- Ca fait un an, banane !

Oups. En même temps, j'avais aucun élément pour m'aiguiller. Ah si, des albums de Tang et de Sugartown que je lui avais offerts pour l'occasion, qui trônent sur son bureau. Soit la tempête de lumière m'a repris mon sens de l'observation, soit elle m'a déconnecté du réel.

- Je t'ai dit, j'suis mauvais en Histoire.

Elle rit encore. C'est moi qui la rend heureuse comme ça ?

- Tu me rends heureuse.

Et ben au moins je suis foutu de mettre dans le mille sur un point. Vive moi...

- Non, c'est toi qui me rend heureux. Celui qui te rend heureuse, c'est ton amant.

- Mais c'est toi mon amant, andouille !

Non, me dites pas qu'on a VRAIMENT eu cette conversation guimauvause en rose fluo ?

- Tu trompes un mec avec moi ? DEPUIS TOUT CE TEMPS ??

- Mais non, soupira-t-elle, y'a que toi....

- Je voulais sortir une vanne vaudevillesque, mais tu me fous le doute. C'est vrai ?

Ah ouais quand même. Guimauve + lourdeur = mauvais Dannie. Pas bien... Après on s'étonne que tout le monde ait laissé tomber l'histoire.

Pourtant, mon coeur commence à battre très fort dans ma poitrine. Autant pour la perte de connexion au réel, je suis vraiment devenu con avec tous ces trucs à base de monstres, de feu et de lumière.

Elle m'a regardé droit dans les yeux. 

- Oui. Il n'y a que toi. Normal. Tu veux des arguments ?

Pouah, bordel. Ca va finir en livres pour enfants, cette histoire. J'ai vraiment été comme ça ? Et comment ça se fait que je dise exactement les mêmes choses que quand ça s'est passé ?

Elle me caresse doucement le visage, le sien porte une expression préoccupée. Y'a pas à dire, elle m'aime vraiment. Pauvre Solenne...

- Tu mérites mieux, lâchai-je en lui tournant le dos.

- Arrête....

Elle m'a enlacé doucement et pris la main.

- Même s'il y avait mieux, j'en voudrais pas. Du är den rätte.

Deuxième flash direct dans ma gueule. Elle a dû le sentir.

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Orj, tu fais de la merde, là. En plus ça traîne en longueur, ton truc. Trouve quelque chose, vite.

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- Tu connais la différence entre faire l'amour sur un bâteau et la bière sans alcool ?

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Noooon, pas ça....

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- Noon... dit-elle en riant doucement.


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STOP ! STOOOOOOP !!
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- It's fucking close to water.

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Non, mec, non. Trouve autre chose, vite. Ils vont pas tarder à zapper en masse pour aller chez Atom, là. En plus il offre la bière et ses dessins sont cool. Alors tu te démerdes, mais tu me fais mieux que ça.

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Elle rit encore. Mais pas de ce rire stupide qu'a, hélas, une majorité de filles. Non, jamais. Elle a toujours une forme intelligente de rire. J'aime ça. 


Silence.

- Ca faisait longtemps que je t'attendais. Je commençais à me demander si t'allais venir.

- C'est beau. Je pourrais dire la même chose, mais ça serait du plagiat.

- Je l'ai pas vue passer, cette année...

- Moi non plus, t'as pas idée.

Elle a eu un regard surpris, prête à poser une question. Puis elle a soupiré d'aise.

- N'empêche, à chaque fois tu m'envoies dans une autre dimension.

J'ai eu un sursaut et me suis retourné vers elle. Garder le calme. Le retrouver, plutôt. Me plonger dans la contemplation d'elle.

- Comme une réalité alternative ?

Maïeutics in bed, experiment 1. 

- Ouais, voilà. Exactement. C'est fou, t'as mis le doigt dessus. 

- J'ai juste dit ça au hasard...

Essayer d'avoir l'air naturel.

- Y'a pas de hasard.

- C'est pour les noobs.

- Absolument.

- Donc oui, une réalité alternative. Où tout est beau, parfait, ordonnée. Je la sens du bout des doigts, enfin, du bout de mon âme, si on peut le dire comme ça. Mais je reste toujours aux portes, en quelque sorte. 

- Le paradis ?

Elle a souri.

- Ouais. Si on veut.

Une pensée m'a claqué dans la tête. Si je suis mort, peut-être que rien de tout ça n'est réel et que je le sais au fond de moi, de mon âme, justement, et que du coup, je cherche des indices dans ce qu'elle pourra me dire parce qu'elle est aussi un produit de cet univers virtuel dans lequel je me suis retrouvé propulsé, que ce soit par la lumière ou la fin du monde.

Elle s'est blottie contre moi et je l'ai embrassée. Continuer à jouer le jeu, si c'en est un.

- Et l'enfer ?

- Je pense pas que ça existe. Mais si c'est le cas, ce serait sans doute un monde étrange et sombre. Peut-être trippant aussi, mais fondamentalement malsain. Avec des monstres, aussi, je pense. Peut-être même vaguement humains. Une sorte de matérialisation de ce qu'on a de plus sombre au fond de nous.

Elle me glace. J'essaie de parler plus fort que mes battements cardiaques.

- Et si jamais un truc comme ça existait, on pourrait s'en sortir ?

- Je ne sais pas. Je sais juste que la lumière est la plus forte.

Ouga ouga in my mind. Booyaka burnin' in my heart. 
J'aime cette fille plus que tout au monde, mais là je voudrais repartir sauver les autres, en sachant comment jouer au héros cette fois. Elle a balayé toutes mes questions en une seule phrase sans le savoir. Je crois avoir enfin ma réponse. En tous cas c'est ce que dit la chaleur en moi. 

Pourtant, pas de Deux Ex Machina pour moi cette fois. Je reste désespérément cloué au lit avec la femme de ma vie, d'autant qu'à ce moment, j'étais encore censé l'ignorer. De mes rêves alors. Ouais... ça colle carrément.

J'ai souri, apaisé.

- Hé, ça va ? T'as l'air bizarre.

- J'me suis jamais senti mieux.

- Alors tout va bien, sourit-elle.

Oui. Tout va bien. Dans les meilleur des blablablabla. Mais il faut cultiver notre jardin. On se dit "je t'aime", et la vérité du sentiment et du moment me réchauffe le coeur encore davantage. 

On s'est endormis.









Vendredi 6 juillet 2012 à 17:59

Pour des raisons de santé, cet article sort super en retard. Voyez-y donc un teaser du dossier Rock Français à paraître chez Happe:n






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Après une super rencontre sur BDC One dans l'émission Larsen Live, où le groupe s'est offert en acoustique et une deuxième claque à la découverte de leur premier album, «You need to know yourself», galette remplie à ras bord d'un rock progressif délicieux, entre complexité technique et simplicité du coeur, j'ai enfin eu l'occasion de les voir en live à L'Estran, aux côtés d'Here[in] et Id-Fix, pour une soirée massive.




Et ce soir y'a du skill mesdames et messieurs.

Ironiquement placés après les enfants pas si sages en forme de gendres idéaux d'Id-Fix, Weendo investit la scène avec sa puissance sonique stable et patiente. Leurs ambiances nous plongent en nous mêmes, et là, de deux choses l'une. Soit tu attrapes ta psyché et tu bondis avec eux rider leurs vagues éthérées jusqu'à ce que tes jambes lâchent, soit tu restes dans un coin et tu fais semblant d'apprécier.
Aussi subtile que se fasse leur musique, il n'y a pas de demi-mesure possible dans leur état d'esprit. Sans pour autant dégainer un optimisme aussi brûlant qu'un Mass Hysteria qui se mettrait au prog, Weendo prend le parti d'aborder chacun de leurs thèmes de manière positive, même les plus sombres (Betrayal). Détail important, on a jamais l'impression d'écouter toujours la même chose jouée différemment, principal écueil de ce style dans lequel pas mal de clones gravitent autour de quelques rares merveilles.


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Arborant ce soir un maquillage surprenant, oeuvre de Mary Ganter, ils sont à fond dans leur élément, et ça se sent. Weendo déchaîne les vagues sur fond d'émotions sincères et passe des tranches de vie au spectre du voyage intérieur. Intime.
Les bras grands ouverts, ils nous acceuillent dans leur univers, limpide et pourtant si tortueux. Si l'album s'écoute d'une traite, il peut s'avérer un peu moins évident de plonger dans leur musique en live. Et pourtant... ça en vaut terriblement le coup. Maturité, puissance et véracité transpirent dans leur son.


Techniquement, ils alignent les prouesses, notamment au niveau des rythmiques inversées qu'ils gèrent à merveille. Il doit y en avoir seulement deux ou trois dans tout le set, mais si bien placées qu'elles arrachent des sourires à chaque fois. Je parlerais pas du niveau du bassiste qui est proprement indécent, jamais vu un mec gérer autant sur une six cordes. Pour ce qui est des guitares avec leur accordage inventé à la maison, même chose. Déluge de mélodies qui laissent place à des pêches bien poignantes, on en redemande. La batterie est stable et carrée, avec juste ce qu'il faut de fioritures et remplissage pour être diablement efficace. Et, last but not least, Laeticia au chant et aux claviers gère les deux à merveille, et fait preuve d'un coffre impressionnant pour sa petite taille.


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Depuis Deborah d'Here[in], j'avais pas autant accroché sur une voix féminine. Vibrante et naturelle, loin des clichés forcés du progressif à chanteuse d'opéra qui met du chant lyrique partout même quand il y en a pas besoin, Laeticia pourrait bien être l'élément catalyste du groupe, capable de canaliser la puissance brute de ses 4 collègues et d'accélérer l'arrivée du feeling dans les morceaux, sans le modifier. Ce serait pourtant une erreur de passer à côté des 4 générateurs du groupe. Sur scène, ils font preuve d'un charisme alchimique, concentrés sur leurs instrus, parfois immobiles au milieu des tempêtes sonores qu'ils déclenchent. 


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Une fois les tornades retombées, les Weendo se révèlent sans surprise très proches de leur public, ils seront d'ailleurs les derniers à partir, après avoir partagé leur énergie positive avec tous ceux qui auront eu envie de discuter avec eux autour d'un verre, d'une clope, ou des deux. Partage et humilité, donc, mais aussi imitations des Inconnus, auxquelles Terence, un des deux guitaristes (celui que Mary a maquillé en Ramsès II), excelle tout particulièrement. Je les verrais bien nous faire un sketch entre deux morceaux dans un futur proche, une fois qu'ils auront bien explosé comme il faut sur la scène progressive.

Samedi 18 août 2012 à 4:04





- Bon, ils foutent quoi, les deux, là ? 

Comme pour me répondre, le grand type carré à la barbe est arrivé en courant.

- COUREZ ! Putain courez ! Restez pas là !

Il était tout débraillé et portait son sabre gigantesque sur l'épaule.

- La prochaine fois vous m'écouterez dès le début au lieu de jouer aux héros ! m'exclamai-je en me retournant pour courir. Derrière moi, j'entends son pas lourd se figer. Il s'était arrêté pour reprendre son souffle. A regardé derrière lui. La terre ne tremblait pas cette fois-ci, mais quelque chose venait.

Personne n'a rien compris, je l'ai vu dans leurs yeux. Kepa s'est mis en garde, rassemblant ses dernières forces pour se défendre, mais il pouvait rien faire face à la déferlante de lumière qui nous a tous recouverts.

Enveloppés.

Embaumés.


La réalité s'est disloquée. Les murs, le château, la lande ont disparu progressivement, particule par particule, à une vitesse sidérale. Ou sidérante. Ou les deux. Je sais pas. Je sais plus. J'arrivais pas à penser. A formuler des idées ni même à les avoir. Je n'étais qu'une conscience endormie dans un train en partance pour l'inconnu.
 

Je ne me sentais même pas incarné. Des nuées de lignes multicolores, courbes et dynamiques habitaient mon champ de vision. Ambiance cosmystique, mes frères.


Toutes les lignes ont commencé à former des silhouettes vaguement familières, à dessiner les contours d'une réalité que je reconnaissais.


Back in the bar. Bewildered and feeling magnificient. Grandiose.
Les yeux des autres étaient aussi grands ouverts que les miens. Souffles courts. 


- Salut les jeunes ! Alors c'était comment ?


Soda. J'avais même pas la force de vouloir l'étriper.

J'ai posé mon sabre sur une table et j'ai continué à trembler. Mon corps avait peur. Quant à savoir si moi aussi, j'avais des doutes.


- Infernal.


La voix de Sonia a cinglé comme un coup de tonnerre glacé.


- On a perdu Dan, a dit Kepa d'une voix grave.


Ah oui tiens c'est vrai ça.


- J'ai une idée d'où il peut être. 


Solenne. Fille-mystère par excellence. Où est-ce qu'il a bien pu la trouver ?


- Bien, bien ! Alors, vous étiez où ?


On lui a parlé de la lande et de tout le bordel. De la cabine téléphonique en pleine forêt, des feuilles qui dansent, du monstre humanoïde improbable et zombifié. Du château en ruines. C'est là que j'ai appris par Kepa que le streumon était en fait un des Pink Babies, le groupe de mous du genou mais tendus du slip qui sont venus foutre le bordel à la fin du set de Crave - pourquoi pas pendant, d'ailleurs ? Ils sont cons ou quoi ? Et qu'est-ce qu'ils foutaient ici ? Y'a une strate exprès pour chaque groupe de personnes, nous a expliqué Soda la première fois où nous avons tous été réunis -enfin, avant l'arrivée de la copine de Swordman - mais celle où on a trouvé les incultes musicaux ressemblait clairement à un enfer, comme l'a dit Sonia. Et si c'était là qu'on était tous, et qu'eux en avaient simplement une forme plus évidente que la nôtre ?


J'ai commencé à whatthefucker grave.


Les yeux de Soda se sont assombris et des ondes noires se mirent à tournoyer doucement autour de sa tête et du haut de son corps.


- Alors, Hellboy, on était où ?


J'essayais sans doute de prouver que j'avais repris du poil de la bête.
Pas forcément très convaincant.


- Dans une réalité alternative hypothétique, a répondu Solenne.

- Absolument, soupira Soda. Et c'est pas ce qui était prévu.


Sursaut et explosion de mes idées. Argh.


- Mais c'est pas vrai, vous nous manipulez depuis combien de temps ?! hystérisa à moitié Lola.

- Calme-toi... Même si c'est vraiment le cas, on y peut rien. 

- MAIS PUTAIN, REPONDS ! hurle-t-elle en traçant vers lui. Kepa se bouge pour la retenir.

- Arrête !

- Bon, bon, bon, dit calmement Soda. Nous appartenons à Shell Haven, une institution spirituelle qui s'occupe de gérer tout ce qui se passe dans l'Univers, comme je vous l'ai déjà dit. Mais croyez pas qu'on fait ce qu'on veut. On a des règles. 

- "Nous" ? 

- Quoi, "nous" ?

- C'est qui, "vous" ?

- Un peu de tout. Démons, damantes, banshees, esprits... Des trucs comme ça. Tu en as vu ici même, Kepa, la première fois que tu es venu ici.

- Attends attends attends, tu vas trop vite, là, lui répondit l'intéressé. Développe-moi tout ça.

- C'est ça, fais-le parler, autrement je fais un scandale, lui souffle son insupportable copine à la mâchoire aiguisée.

- C'est pas le moment, lui cale-t-il avant de reprendre : Les damantes, les banshees, qu'est-ce que c'est ?

- Un type de Succubes - des démons femelles, donc - qui possèdent de très grands pouvoirs. Comme vous le savez si vous êtes amateurs du cinéma grand public des années 2000-2010, avec les grands pouvoirs viennnent toujours un lot conséquent de responsabilités. Les damantes s'occupent de faire en sorte que ce qui doit arriver arrive, peu importent les interférences. Les banshees, c'est plus du travail de protection. Dans la plupart des cas, elles fonctionnent ensemble. 


- Où sont les autres gens ? Ceux qui étaient dans le réel avec nous ? a demandé Sonia.

- C'est ici, le réel. Quant aux gens, ils sont dans d'autres strates, tout simplement. Je vous l'ai déjà dit, en plus. Vous avez vraiment oublié ? Ah oui, c'est vrai, tu dormais, toi... Bon, je pensais que les autres t'auraient mise au parfum. Les gens sont toujours vivants si vous l'êtes aussi, il est d'ailleurs possible de les voir par intermittences dans des certains endroits ou si l'on se déplace à certaines vitesses. Mais c'est pas encore le moment pour vous de découvrir tout ça.


Jetez moi des asperges, mais il est pas en train de dire qu'il y a des chances qu'on soit tous morts ?



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J'ai ouvert les yeux dans un état de bonheur avancé. Me suis levé sans la réveiller après avoir fixé le plafond flou pendant un quart d'heure pour aller faire du café. Mes lunettes rendaient pas le monde moins embrouillé, au contraire.

Bon, j'ai jusqu'à ce que Solenne se lève pour clarifier tout ça. 

En ce qui concerne le monde alternatif, ou plutôt le réel post-fin du monde, j'en ai déjà vu pas mal. Mais la première fois que j'ai ouvert une porte en haut des escaliers du bar, je me suis retrouvé dans le passé, pas dans un monde encore plus bizarre que le précédent. En tous cas, là, maintenant, c'est bien dans le passé que je suis à nouveau. Pas le même, mais ça peut être la marque d'un cycle : les portes me mènent un coup dans le passé, un coup dans un endroit étrange. On aurait donc à la fois un chemin à vivre soi-même et un autre en groupe. 

On est à peu près à un an de la fin du monde. Solenne savait déjà, vu qu'elle a plus de 18 ans, âge auquel elle a obtenu le bouquin de sa mère.

Ma copine est la Nostradamuse de notre siècle. 
Fuck.

S'il y a une raison à tout, quelle pourrait être celle qui m'a amené ici ? Et comment ? Qu'est-ce que c'était, cette lumière ? D'où venait-elle, qui l'a envoyée ?

Calme. Chaque chose en son temps. Regrouper les données et les recouper. Dernière fois, dans passé avec Solenne, s'est passé des trucs bizarres aussi. J'ai revécu ma rencontre miraculeuse avec elle. La violente sensation de connexion énergétique dans le bus, agréable et agressive, et le coup du miroir de la salle de bains. 

J'y traçai en vitesse en manquant avec style de renverser (sobrement) mon café.




Les yeux plongés dans mon reflet, rien ne se passe. Pas d'effets psychés ou de voix bizarre qui me parle à travers ma projection.

Un peu dérouté, je retourne à mon café. 

Hier, j'ai cru avoir la solution quand Sol m'a dit que la lumière était la plus forte. Qu'il suffirait de faire comprendre aux autres qu'on devait accepter de ne rien maîtriser et de ne pas tout comprendre pour résoudre  l'énigme. Et qu'on devait chercher la source de cette lumière.

J'ai pas encore le tableau complet, mais quelqu'un, quelque part, m'a donné l'occasion d'arranger ça. 

Solenne m'a rejoint dans la cuisine. Coup au coeur.

- Bonjour, mec ! m'a-t-elle souri.

- Bonjour mademoiselle, tentai-je d'avoir l'air naturel, bien dormi ?

- Impeccable, et toi-même, monsieur ?

Son sourire grandit.

- J'ai pas à me plaindre, souriai-je à mon tour.

Profiter d'un futur moment d'absence pour trouver le livre écrit par sa mère ou trouver un moyen de lui faire dire indirectement ce qu'il me faut sans qu'elle s'en rende compte.

Ca s'annonce sportif.

Bordel de putain de merde. Dieu, si T'existes, Tu fais chier. 

[Oui, je sais, c'est moi qui dis ça, alors que j'ai déterminé que son existence était la seule explication possible à ce merdier ambiant. Mais il y a Shell Haven aussi. Peut-être pas besoin d'un dieu après tout... ]

Mais est-ce que je sais vraiment ce qu'il faut que je trouve ? Et surtout, est-ce qu'elle a l'info ?

Bon, on va ordonner tout ça.


- Oh, t'es choupi, t'as fait du café sans le mélanger avec du thé !


Selon toute vraisemblance, je dois apprendre quelque chose sur l'autre monde pour pouvoir y retourner. 


- Quand on peut faire plaisir...


Thé, café, mélanger. Peut-être un truc à trouver avec ça.

Elle m'a souri. Comment vraiment vouloir retourner de l'autre côté se fritter avec des monstres et mettre sa vie en jeu pour la défendre à coups de basse à chaque coin de rue alors que cet envers du décor vient justement de vous offrir environ 365 jours de plus à partager avec l'ange adorable qui s'est retrouvée avec vous ?

C'est pas comme si j'avais le choix, OUAIS, JE SAIS.


BAM.


J'ai été viscéralement saisi par le retour de la théorie de la mort, sauf que cette fois elle portait sur nous tous.


Depuis qu'on a vécu la fin du monde, on nage au milieu d'inconnues, et y'a-t-il plus absolue inconnue que la mort ?


Ca colle avec tout. On serait retournés à une sorte d'amas de conscience universelle et on ne serait plus que des souvenirs qui se débattent avec l'espoir de sortir du labyrithe. Des rêves qui s'affranchissent de toute logique physique et développent leur vraie nature à travers des pouvoirs défiant la gravité, uniquement conduits par leur mémoire qui les cintre dans un univers qu'ils connaissent bien, porte ouverte à tous les délires strataires qu'on a vécus, que ce soit dans l'enceinte de la ville ou dans cette foutue lande. Des rêves capables de ressentir, penser, agir, doués de leurs 5 sens, qui ne sont finalement que des matérialisations de la conscience, et n'existent plus physiquement d'aucune façon. Nous sommes des illusions. 

 



 


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